C'était la toute première priorité du grand plan anti-déserts médicaux présenté il y a un mois par Édouard Philippe et Agnès Buzyn. Un nouvel arrêté de « zonage » médical (le dernier datait de 2011) a été publié ce mercredi au Journal officiel.
Plus favorable, il identifie les territoires où l'offre de soins est jugée insuffisante. Comme promis par le Premier ministre, les zones qui pourront bénéficier des aides conventionnelles (notamment 50 000 euros sur trois ans pour l'installation) passent ainsi de 7 à 18 % de la population nationale.
Nombre de consultations accessibles par habitant et par an
Ces secteurs où l'offre médicale fait défaut seront définies grâce à l'indicateur APL (accessibilité potentielle localisée), développé en 2012 par la Drees pour les généralistes, qui a bénéficié d'un « important travail de refonte de la méthodologie » précise le ministère. Calculé en fonction du nombre de visites et de consultations par médecin, du temps d'accès à ce dernier et de la consommation de soins par classe d'âge, et avec une limite d'âge pour le médecin (65 ans), cet indicateur APL s'exprime en nombre de consultations accessibles par an et par habitant.
Nouveauté : chaque région est désormais constituée de territoires de vie-santé qui constituent la maille territoriale du zonage. Ces territoires sont composés eux-mêmes d’un ensemble de communes. L’indicateur APL y est calculé comme étant la moyenne, pondérée par la population de chaque commune, des indicateurs APL des communes composant cette unité territoriale. Objectif : établir une définition harmonisée des zones fragiles et concentrer les aides au maintien et à l’installation sur les territoires les plus sinistrés.
36 % de la population francilienne éligible !
En pratique, lorsque l'indicateur est inférieur à 2,5 consultations accessibles par an et par patient, le territoire ciblé entre dans la « sélection nationale » et fait partie des zones dites d'intervention prioritaire (zones A). Celles-ci ne peuvent être modifiées.
Si un territoire a un indicateur situé entre 2,5 et 4 consultations accessibles par an, il fait partie du « vivier », où les besoins en soins de la population « ne sont pas assurés de façon satisfaisante ». Au sein de ce vivier, l'agence régionale de santé (ARS) concernée peut retenir des indicateurs complémentaires (part de population en ALD, proportion de médecins en secteur I, part des hospitalisations évitables). Dans ce cas, la zone en question sera également considérée comme prioritaire (zones B).
Le reste des zones du vivier est considéré comme « d'action complémentaire » ou simplement de vigilance. Le directeur de l'ARS peut inclure des secteurs dont l'indicateur est supérieur à 4 consultations par an et par habitant (de façon limitée).
Pour chaque région, l'arrêté définit la part de la population résidant dans les zones fragiles prioritaires. Deux grandes régions métropolitaines se détachent : le Centre-Val-de-Loire où près de 40 % de la population est concernée, et l'Île-de-France (36,7 %). La totalité des habitants sont éligibles en Guyane et à Mayotte, et la moitié en Guadeloupe et en Martinique !
Les syndicats sur leur faim
Malgré ce zonage élargi, les syndicats de médecins restent sur leur faim. « L'indicateur APL est un peu mieux construit, mais les impératifs budgétaires font que nous sommes bien en dessous des besoins réels », juge le Dr Claude Leicher, président de MG France. Il estime que... 62 % de la population vit dans une zone où il y a moins de 4 consultations par an et par habitant. « Sur le terrain, il va y avoir des déceptions, le gouvernement n'a pas encore pris la mesure du problème », regrette-t-il.
Le président des Généralistes CSMF, le Dr Luc Duquesnel, déplore lui aussi un texte qui ne permet pas de s'adapter aux réalités des territoires. « On se retrouve avec des zones urbaines très sous-dotées, qu'on ne pourra pas considérer comme prioritaires, alors qu'elles le sont à cause de la limite des 18 %, précise le Dr Duquesnel. C'est le cas de la préfecture de la Mayenne où près de 7 000 habitants n'ont pas de médecin traitant… »
Source : J.O. du 15 novembre 2017
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