L’assurance-maladie continue à développer les services de l’espace Pro du site ameli. Après l’historique des remboursements en 2007, voici les e-avis d’arrêt de travail (AT) et les e-protocoles de soins. Le règlement arbitral prévoit 250 euros par an aux médecins qui en dématérialiseront plus de 75 % (75 % des AT et 75 % des protocoles). Quels sont les avantages de ces services ? Font-ils gagner ou perdre du temps ? Le Quotidien les a fait tester par un de vos confrères et a intégré les réponses de la CNAM. Résultat : si le protocole de soins peut présenter quelques avantages, l’AT en ligne se révèle chronophage pour le médecin.
La préparation à l’accès à l’Espace Pro
Première étape, l’accès à l’Espace pro n’est ni « automatique » ni « universel » et il faut installer des composants de sécurisation CPS. Seuls certains navigateurs (Internet Explorer, Firefox mais pas Safari) sont compatibles avec les téléservices. De plus, les téléservices ne sont pas pour le moment compatibles avec Windows Seven, livré avec tous les PC du commerce.
Si vous remplissez les conditions d’éligibilité vous pouvez aller sur la page http://www.presta.ext.cnamts.fr/ , et suivre les indications. (il y a 2 programmes à télécharger et à installer)
Attention cependant, car ces petits programmes peuvent interférer avec votre logiciel de télétransmission. Le mieux est encore de prendre contact avec votre CPAM qui vous enverra un de ses délégués pour faire l’installation. Sans oublier de vous renseigner auprès de votre revendeur pour savoir si des conflits avec votre logiciel ont été signalés.
L’accès à l’Espace Pro n’est pas immédiat car il faut d’abord se connecter à Ameli, puis à votre espace perso, d’où deux lectures des composants CPS. Cela qui prend plus de 90 secondes. Rajoutons le temps de lecture de la carte du patient d’environ 30 secondes. Comptez environ 2 minutes avant de pouvoir travailler. Il faut donc anticiper et faire autre chose pendant ce délai.
D’autant plus, que les utilisateurs font état de messages d’échec de connexion en relation avec des périodes d’indisponibilité. Si c’est dû à des opérations de maintenance pendant la journée, il faudrait que la CNAM alerte à l’avance les médecins utilisateurs.
L’ergonomie a des progrès à faire, avec des sites imbriqués les uns dans les autres et des fenêtres qui s’ouvrent les unes sur les autres, ce qui fait que l’utilisateur ne sait plus où il est.
Les protocoles de soins en ligne
Les points forts :
- Les informations de la carte Vitale sont renseignées automatiquement
- Les protocoles restent visibles pendant toute la durée de leur validité (maximum 5 ans). Ils sont ensuite archivés par la CNAM
- L’accès direct aux référentiels de prise en charge des ALD établis par la HAS
- La possibilité d’enregistrer des brouillons pour terminer le protocole en l’absence du patient, ce qui oblige toutefois à se reconnecter et à avoir son lecteur de carte CPS sous la main
Une nouvelle fonction, disponible à l’automne permettra au médecin d’amender un protocole qu’il avait dans un premier temps clôturé et de demander un nouvel avis au médecin conseil sur les modifications apportées (par exemple dans le cas d’une nouvelle pathologie ou de l’évolution de la maladie) sans avoir à réécrire la totalité du protocole de soins.
- La concertation possible avec le médecin conseil se fait avec délai (48 heures) mais plus rapidement que par papier. On peut ensuite imprimer le volet patient du protocole pour l’envoyer au patient, ainsi assuré d’être pris en charge à 100 % pour sa maladie.
- Les autres médecins qui suivent le patient ont aussi accès à ce protocole ce qui les informe sur l’ALD d’un patient qui n’a pas son protocole avec lui (cette fonctionnalité nous a été signalée par la CNAM mais nous n’avons pu la vérifier lors du test).
Les points faibles :
- Dépersonnalisation : lors de la concertation, on n’a pas le nom du praticien conseil qui vous répond
- Trop de cases à cocher et de listes déroulantes (ce que la CNAM appelle « l’assistance au remplissage »)
- Défilement d’écrans dans lesquels on se perd facilement
En résumé :
Le service est évidemment gagnant pour les caisses, puisqu’on écrit directement dans les bonnes cases des ordinateurs du service médical, qui n’a plus qu’à cocher la case « validé » ou la case « refusé ». Mais cela évite au médecin d’adresser le formulaire papier, notamment aux petites caisses dont il faut retrouver l’adresse (mais qui ne proposent pas encore toutes le service...).
L’arrivée de nouvelles fonctionnalités à l’automne montre que le service est en phase d’amélioration et que la CNAM a écouté les retours des premiers testeurs.
Un didacticiel est disponible sur ameli.fr http://didacticiel.ameli.fr/pse
Les arrêts de travail en ligne
Pour les AT, le bénéfice pour le médecin est peu apparent, s’agissant d’un formulaire qui prend 15 secondes à remplir à la main alors qu’il faut de 1 à 3 minutes en ligne, selon la CNAM elle-même (non compris le temps de connexion). Le test a pris trois minutes.
En effet, le médecin se transforme en opérateur de saisie avec obligation (sous peine de blocage) de remplir l’adresse du patient, sa profession, s’il s’agit d’un accident ou non (responsabilité à endosser), les heures de sortie…
Si on coche, par esprit rigoureux, la case « le patient a déménagé », il faut encore renseigner manuellement sa nouvelle adresse. Et il y a une case anodine à cocher « mon patient accepte que je transmette pour son compte le présent arrêt de travail » qui vient encore alourdir le tout.
Le summum de ce transfert de tâche est atteint par le dernier écran (voir copies) qui stipule que le médecin doit imprimer lui-même (et avec son imprimante) l’exemplaire que le patient doit remettre à l’employeur. Un « accusé de dépôt » est proposé mais comme il est non intégrable dans les logiciels médicaux du commerce, les médecins consciencieux se voient obligés à une double sauvegarde.
En résumé
En l’état, le e-arrêt de travail est chronophage pour le médecin. Il n’est utile qu’aux caisses et au patient qui n’a plus à envoyer les volets 1 et 2 à sa caisse dans les 48 heures Selon la CNAM, sa prise en charge pour le versement des indemnités journalières est plus rapide. « C’est un vrai service que le médecin procure à son patient », argumente Jean-Marc Aubert, directeur délégué à la gestion et à l’organisation des soins à la CNAM, qui assure : « Nous voulons tenir compte des attentes et des remontées que nous avons eues de la part des médecins et nous travaillons à la simplification des écrans pour faciliter et raccourcir le remplissage de l’arrêt de travail. » À suivre donc.
Didacticiel disponible sur ameli.fr à http://didacticiel.ameli.fr/arretdetravail.html
Au total
L’Assurance-maladie assure la promotion de l’usage des formulaires en ligne, en mettant en avant des principes de modernité, d’écologie (le zéro papier) et en proposant une prime de 250 euros/an.
Mais pour toucher les 250 euros, il faudra réaliser 75 % de e-protocoles et 75 % de e-arrêts maladie,
Ce qui serait difficile aujourd’hui puisque toutes les caisses ne proposent pas ces services et que de nombreux patients n’ont pas leur carte Vitale sur eux.
Le bouquet de téléservices partait d’une bonne idée, mais il n’est pas utilisable, en l’état, de façon courante. La qualité n’est pas assez professionnelle (accès trop long, interface non compatible avec tous les environnements informatiques…), d’une élaboration sans concertation avec la profession (plusieurs syndicats ont d’ailleurs appelé au boycott) et souvent bien plus chronophage que le papier.
Une conception co-partagée avec les représentants de médecins et une meilleure intégration avec les logiciels médicaux du commerce seraient grandement souhaitables. L’Assurance-maladie semble en avoir pris conscience en apportant de premières améliorations. Elle a jusqu’au 1er janvier 2011 pour peaufiner ses nouveaux services.
Hot line nationale 0 811 709 710 et support-technique-ps@cnamts.fr
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