Réélu « à l’unanimité », le Dr Luc Duquesnel entame depuis samedi un quatrième mandat de quatre ans à la tête des Généralistes-CSMF. Engagé dans l'âpre bataille des négociations avec la Cnam, le généraliste de Mayenne entend « faire du médecin généraliste le chef d’orchestre du parcours de soins », dans un contexte de réformes tous azimuts.
Consultation « médecin traitant » à 105 euros pour nouveau patient en ALD, refus de nouvelles contraintes, réponse collective aux soins non programmés : à quelques minutes de la séance de négociation bilatérale avec l’Assurance-maladie, ce mercredi, le chef de file des généralistes de la Conf' a confié en exclusivité au « Quotidien » ses priorités.
LE QUOTIDIEN : Les bilatérales ont repris ce mercredi entre la CSMF et l’Assurance-maladie, dans un contexte tendu. Quelles sont vos priorités pour les généralistes ?
Dr LUC DUQUESNEL : Les priorités des généralistes, ce sont les besoins de la population ! Comment prendre en charge les soins non programmés et trouver le plus rapidement possible un médecin traitant pour les 650 000 patients en ALD qui n’en ont pas.
C'est pourquoi, au niveau des Généralistes-CSMF, nous venons de proposer cet après-midi à la Cnam de mettre en place une consultation à 105 euros pour les généralistes qui recevraient un nouveau patient en ALD et signeraient pour être leur médecin traitant. Le généraliste devra remplir un volet médical de synthèse structuré, à verser dans le dossier médical partagé. Ce document pourra ensuite être récupéré dans le DMP par les services d’urgence, le médecin spécialiste où l’hôpital. Cette mesure coûterait 68,5 millions d’euros pour 2023. Et sans doute moins ensuite, car il ne restera plus que les patients en ALD dont le médecin traitant est parti à la retraite, sans être remplacé.
Quelles sont vos lignes rouges ?
Ce sont les nouvelles contraintes ! Or, pour l’heure, la caisse essaye d’atteindre ces objectifs d'accès au médecin traitant sous forme de contraintes ou d'engagements, et avec des revalorisations inconnues… Nous souhaitons plutôt proposer des incitations qui ont du sens.
Sur les soins non programmés par exemple, on ne peut pas accepter de faire porter la responsabilité individuelle au généraliste. Ça doit passer par une organisation collective. En Vendée par exemple, les CPTS prennent en charge tous les soins non programmés. Ça fonctionne bien et ça ne leur a jamais été imposé. Ensuite, si on répond aux besoins de la population, effectivement, cela doit faire l’objet de revalorisations de l’acte, et éventuellement de forfaits. Dans ce contexte, de nouvelles contraintes sont inacceptables. Je pense qu'il faut aller vers une organisation collective, autour notamment des services d'accès aux soins (SAS) ou des CPTS, mais laissons la main aux médecins et faisons-leur confiance.
Pour la PDS, la nuit, le dimanche, les jours fériés, le lundi de Pâques : nous avons également su répondre à la demande de soins, nous savons aussi nous organiser collectivement ! Nous couvrons 96 % des territoires les week-ends et 95 % en soirée. Là aussi, les nouvelles contraintes sont inacceptables.
Trois niveaux de consultations ont été annoncés, où en sommes-nous ?
À quatre semaines de la signature, on ne connaît toujours pas les bases de cette convention médicale… Nous ne savons pas quels seront les niveaux tarifaires des échelons, ni ce qui sera mis dedans. Si on nous dit que les consultations des patients en ALD sont au niveau 1, ça ne va pas le faire ! Et ce niveau 1 de consultation, sera-t-il à 28,50 euros ou à 30 euros ? Faudra-t-il s’engager dans le contrat d’engagement territorial (CET) pour avoir le droit d'accéder à ce premier niveau ? On ne sait toujours pas.
Vous avez lancé le 23 janvier un mouvement « illimité » de grève des gardes. Où en êtes-vous ?
Ça marche très bien et nous continuons. Dans mon département, j’ai déjà été réquisitionné pour deux gardes avec des confrères. Pour nous, le but n’est pas de laisser les patients sans médecin, donc on répond à ces réquisitions. Dans certains territoires, comme dans l’Indre, des généralistes ont décidé de faire la grève du SAS. Et l’hôpital de Châteauroux l’a bien vu malheureusement : quand les médecins arrêtent le SAS, ça devient un bazar monstrueux.
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