Maladie cœliaque

Des signes le plus souvent atypiques

Publié le 17/11/2014
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Crédit photo : phanie

La maladie cœliaque est une maladie dysimmunitaire systémique, initiée par le gluten, survenant chez des sujets génétiquement prédisposés, et caractérisée par des manifestations cliniques diverses, la présence d’anticorps spécifiques et d’une entéropathie avec atrophie villositaire.

Plus de 90 % des malades cœliaques expriment le génotype HLA DQ2 et 5 à 10 % possèdent le génotype DQ8. Toutefois, 30 à 40 % de la population générale est porteuse de DQ2 ou DQ8. Des facteurs non génétiques interviennent certainement dans l’apparition de la maladie qui peut rester muette ou se déclarer à tout âge : l’alimentation, les infections intestinales, la malnutrition ou un contexte dysimmunitaire.

La forme classique de la maladie après l’âge de 6 mois, quelques semaines après l’introduction du gluten et associe diarrhée chronique, anorexie, apathie, météorisme abdominal et perte de poids. Cette forme est devenue rare et il faut évoquer une intolérance au gluten devant des signes frustes ou atypiques : selles irrégulières, constipation chronique, appétit diminué, douleurs abdominales récidivantes, prise de poids médiocre, retard de croissance isolé, retard pubertaire, aménorrhée, fatigue chronique, anémie ferriprive réfractaire, douleurs osseuses, fractures sur ostéopénie, aphtose buccale récidivante, hypoplasie de l’émail dentaire, augmentation des transaminases.

Certaines maladies sont associées à une prévalence plus élevée : diabète de type 1, déficit profond en IgA, trisomie 21, syndrome de Turner, syndrome de Williams, hépatite et cholangiopathies auto-immunes, thyroïdite auto-immune et surtout apparentés de 1er degré.

Le diagnostic en pratique.

Le dosage sérique des anticorps spécifiques (IgA anti-transglutaminase) est la première étape du diagnostic. Leur interprétation doit tenir compte de l’âge, du taux sérique d’IgA, du niveau de consommation de gluten et d’un éventuel traitement immunosuppresseur.

La recherche des groupes HLA DQ2 et DQ8 est la deuxième étape. Des anticorps très élevés, supérieurs à 10 fois la normale, associés à la présence de DQ2 et/ou DQ8 confirment le diagnostic. Si les anticorps ne sont pas détectables ou à un taux normal avec une absence de DQ2 et DQ8, la maladie cœliaque peut être éliminée.

Dans les cas douteux, la biopsie intestinale est indiquée. Elle montre une atrophie villositaire totale de la muqueuse associée à une augmentation des lymphocytes inter-épithéliaux.

Régime sans gluten à vie

L’effet du régime sans gluten est le plus souvent spectaculaire en particulier chez le petit enfant : en quelques jours les troubles du comportement disparaissent et l’appétit revient, les selles se normalisent progressivement ; la courbe pondérale se redresse et l’état trophique s’améliore dans les semaines qui suivent. Chez les enfants plus âgés, les symptômes extra-digestifs mettent parfois plusieurs mois pour se corriger.

Si la maladie cœliaque n’est pas traitée ou si le régime est mal fait, les principales complications sont un retard statural et pondéral, une déminéralisation osseuse, une augmentation des pathologies auto-immunes, une hypofertilité et une augmentation de la fréquence des cancers (en particulier du tube digestif).

La règle d’or est de ne jamais faire de régime sans gluten d’épreuve ; son apparente efficacité dans de nombreuses pathologies digestives n’est pas une preuve diagnostique.

L’indication du régime est indiscutable dans la maladie symptomatique, typique ou atypique, mais toujours après confirmation par les tests biologiques ou la biopsie. En l’état actuel des connaissances, le régime doit être poursuivi toute la vie. Des tentatives de réintroduction ne sont proposées qu’en cas d’incertitude diagnostique ou pour confirmer à des adolescents la persistance de leur intolérance et la nécessité de continuer à exclure le gluten de leur alimentation.

Et pour le futur ?

Une thérapeutique possible dans l’avenir serait de traiter les farines par digestion enzymatique des sites toxiques de la gliadine par ingestion de peptidases conjointement aux céréales. D’autres pistes paraissent plus lointaines et hasardeuses: inactivation de la transglutaminase-2 et/ou l’apoptose de lymphocytes spécifiques, vaccinothérapie, synthèse de gluten de blé atoxique par du maïs modifié… L’approche préventive semble également séduisante, reposant sur la promotion de l’allaitement maternel, l’introduction du gluten entre 4 et 6 mois chez un enfant encore au sein et la vaccination anti-rotavirus universelle avant l’âge de 4 mois.

Pr. Jean Pierre Olives. Hôpital des Enfants. Toulouse.

Source : Bilan spécialistes