L’insuffisance ovarienne prématurée (IOP) est la perte de l’activité ovarienne avant l’âge de 40 ans. Elle doit être recherchée devant une aménorrhée primaire ou secondaire de plus de 4 mois. Le bilan biologique confirme le diagnostic en cas de FSH > 25 mUI/ml dosé à 2 reprises à 4 semaines d’intervalle. Sa prévalence est de 1/100 avant 40 ans.
Le nombre de follicules primordiaux décroît de manière physiologique au cours de la vie. D’environ 6 millions de follicules dans l’ovaire fœtal à 20 SA, le stock folliculaire est d’environ 1 million à la naissance. De la puberté à la ménopause, seulement quelques centaines de follicules connaissent le processus de maturation lié au cycle menstruel, tandis que les autres suivent un processus de dégénérescence programmée ou atrésie folliculaire.
Différents mécanismes peuvent entraîner une IOP : une altération du stock folliculaire, tel qu’un défaut au cours de la méiose ou une mauvaise cassure du syncytium des cellules germinales ; une altération de la maturation et ou recrutement des follicules primitifs ; une atrésie folliculaire accélérée.
Conseil génétique
Les étiologies des IOP peuvent être iatrogènes (chimiothérapie, chirurgie, radiothérapie), génétiques, auto-immunes, virales, environnementales mais la plupart sont idiopathiques. Le bilan étiologique doit systématiquement comporter un caryotype à la recherche d’anomalies sur le chromosome X, ainsi que la recherche génétique de la prémutation du syndrome de l’X fragile (FMR1, 50 à 199 répétitions du trinucléotide CGG en 5’ du gène localisé en Xq27.3). En effet, 13 à 26 % des femmes prémutées ont une IOP.
Les IOP peuvent être associés à des pathologies génétiques syndromiques comme dans le blépharophimosis-ptosis-epicanthus inversus (BPES), lié à une mutation de FOXL2. Grâce au développement du séquençage à haut débit, d’autres mutations associées aux lOP ont été mises en évidence, celles du gène NOBOX par exemple.
Une étiologie génétique permet la réalisation d’un conseil génétique pour la famille (discussion de diagnostic prénatal et techniques de préservation de la fertilité si possible) ; des thérapies ciblées sont en cours de développement.
Le bilan étiologique doit également rechercher des causes auto-immunes, associées à l’IOP dans 4-5 % des cas, avec le dosage des anticorps anti-TPO et anti 21-hydroxylase. Ces derniers sont associés aux ovarites auto-immunes. D’autres pathologies auto-immunes sont souvent retrouvées. Une préservation de la fertilité peut être envisagée si le diagnostic est fait à un stade précoce, des techniques de maturation in vivo sont en cours de développement.
Carence œstrogénique
En dehors de la fertilité, la prise en charge de l’IOP doit permettre de combler la carence oestrogénique afin d’agir à court terme sur les manifestations vasomotrices et psychologiques, à moyen terme sur la qualité de vie et la sexualité et à long terme sur l’ostéoporose et le risque cardiovasculaire.
Ainsi, un traitement hormonal substitutif (THS) doit être proposé pour toutes les patientes avec IOP jusqu’à l’âge physiologique de la ménopause (50 ans). Le 17-β œstradiol est préféré si possible à l’éthinylestradiol. Un progestatif doit être associé pour limiter le risque de cancer de l’endomètre. Une information quant aux bénéfices majeurs du THS dans cette tranche de population est indispensable pour améliorer l’observance, qui est médiocre à ce jour.
L’IOP est associée à une diminution de la densité minérale osseuse (DMO) ; une ostéodensitométrie doit être réalisée au moment du diagnostic. Les facteurs acquis d’ostéoporose doivent être recherchés et traités. Il est recommandé de réaliser une supplémentation en vitamine D et une évaluation des apports calciques en plus de l’instauration du THS. En cas de DMO diminuée, un contrôle est souhaitable à 5 ans.
Enfin, Il est important de préciser que l’IOP n’est pas synonyme de ménopause car elle est fluctuante dans 25 % des cas, avec un taux de grossesses spontanées de 4 %. Des techniques expérimentales d’activation folliculaire in vitro par la fragmentation de tissus ovariens, d’ovaires biosynthétiques et de différentiations de cellules souches en ovocytes sont autant d’espoirs pour traiter l’infertilité associée à l’IOP.
Communication de la Dr Valérie Bernard
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