L’atteinte transgénérationnelle au distilbène

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Publié le 02/11/2015
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Crédit photo : BSIP

Mis sur le marché en 1946, le distilbène visait alors à prévenir des fausses couches spontanées. Son efficacité dans cette indication a été contestée dès 1953, par une publication de Dieckemann (Chicago). En 1970, Herbst publie, dans la revue Cancer, sept cas d’adénocarcinomes vaginaux à cellules claires chez des femmes de 15 à 22 ans, évoquant l’année suivante un lien de cause à effet avec le distilbène.

La FDA réagit immédiatement, en l’interdisant en obstétrique, et met en place un registre des cancers du vagin. En France au contraire, il a fallu attendre 1977 pour que le Vidal indique la contre-indication grossesse pour cette molécule.

Depuis, de nombreux articles ont été publiés, décrivant des anomalies de l’appareil génital chez des femmes exposées in utero au distilbène, des problèmes d’infertilité et l’augmentation de certains cancers du sein chez elles (+ 30 à 40 %). Une surveillance standard a donc été recommandée. Cette « première génération », ou « mères distilbène » représente 200 000 grossesses exposées de 1950 à 1973.

Deuxième génération

En 2015, ils étaient 160 000 « filles et fils distilbène », âgés de 38 à 65 ans. En 2011, le New England a publié une liste de 12 risques évalués chez eux. Cette deuxième génération souffre d’atteintes métaboliques et cardiovasculaires (diabète, infarctus, HTA), et une relation avec l’obésité est évoquée (1).

Chez les filles, le risque de survenue de cancer du sein est multiplié par deux, un dépistage adapté s’impose. La survenue d’un adénocarcinome est rare après 30 ans, mais existe, il faut être vigilant (2). En outre, les candidates à une FIV ont de moins bons résultats que celles n’ayant pas été exposées (14 vs 33 % de grossesses).

Dans cette génération, l’appareil génital masculin se trouve également atteint : cryptorchidie, kystes épididymaires, inflammations testiculaires. Plusieurs études confirment la prévalence anormale d’hypospadias. « Cela pourrait être en rapport avec la perturbation du code épigénétique », considère le Pr Fénichel, se fondant sur des travaux sur l’animal. On évoque enfin une augmentation modérée des cancers du testicule.

Des risques persistants de cancer ?

Aucune étude ne retrouve d’anomalies de l’appareil génital des filles de la troisième génération. Elles ne présenteraient pas d’augmentation du risque de cancer mais il faut encore rester vigilant en ce qui concerne celui de l’ovaire. Au total, si la relation entre cancer et distilbène est rare, elle existe, et l’information des médecins est nécessaire. Un guide devrait prochainement voir le jour en ce sens.

(1) Troisir et al. 2013. Epidemiology

(2) Herbst AL et al. 2015

Dr Lydia Marié-Scemama

Source : Le Quotidien du Médecin: 9446