Le traitement, aussi, pourrait être intermittent

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Publié le 30/04/2021
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La trithérapie intermittente 4 jours sur 7, pourrait représenter une nouvelle alternative thérapeutique, avec 93% de succès virologique à 22 mois. Une façon d’alléger les coûts, les effets secondaires et… la charge mentale du traitement.

« En 2019, lors de l’IAS, nous avons présenté les résultats de l’étude randomisée Quatuor, comparant la trithérapie conventionnelle sept jours sur sept (7/7 j) à une version intermittente quatre jours sur sept (4/7 j). À 48 semaines, le critère de non-infériorité était rempli, avec 97 % versus 96 % de succès virologique. Cette année, à la Croi, notre communication portait sur l’efficacité de la phase d’extension à 96 semaines du traitement intermittent, 4/7 j, pour tous les patients en succès. Ses résultats viennent confirmer l’efficacité de cette stratégie, résume le Dr Roland Landman (CHU Bichat, Paris). La trithérapie intermittente pourrait donc constituer à l’avenir une nouvelle alternative thérapeutique, avec à la clé une réduction significative des coûts de traitement, associée à une amélioration de la tolérance. Un bénéfice non négligeable quand, pour rappel, il s’agit d’un traitement à vie chez des sujets dont l’espérance de vie tend aujourd’hui à rejoindre celle de la population générale. »

Extension à 96 semaines sur plus de 600 patients

L’étude randomisée multicentrique Quatuor a testé, sur plus de 600 patients, la non-infériorité d’une trithérapie intermittente (4/7 J) versus conventionnelle (7/7 J) chez des sujets VIH+ sous trithérapie, présentant une virémie inférieure à 50 copies/ml depuis plus d’un an. À l’issue des 48 semaines d’étude, les patients du bras 4/7 J ont poursuivi, ceux du bras 7/7 J ont switché vers un schéma 4/7 J. Au total, 318 sujets ont passé 96 semaines sous trithérapie 4/7 J et 303 sujets sous trithérapie 7/7 J 48 semaines, suivies de 48 semaines de trithérapie 4/7 J.

À noter, le troisième antirétroviral est un inhibiteur non nucléosidique de la reverse transcriptase inverse (NNRTI) ou un inhibiteur de l’intégrase (InSTI) près d’une fois sur deux (46 % et 48 %), qui sont les tritherapies les plus utiliséees actuellement, les inhibiteurs de protéases (PI) plafonnant à 6 %.

À 96 semaines, le taux de succès virologique est de 93 % dans le bras traitement intermittent, avec 4 % d’échecs. « Ce taux, identique à celui observé à 48 semaines, témoigne du maintien d’une forte réponse virologique. On retrouve des niveaux tout à fait identiques sous trithérapie conventionnelle autour de 90-95 % en phase d’entretien du traitement antirétroviral », commente le Dr Landman. Le taux d’échec, faible, varie sensiblement en fonction du choix du troisième antirétroviral. À 96 semaines, on est globalement à 5 % d’échec sous NNRTI et 2 % d’échec sous InSTI. Enfin, parmi les 19 patients en échec, 7 présentent un VIH résistant à certaines molécules : deux résistances aux analogues nucléosidiques (Na), quatre aux NA et aux NNRTI et une aux NA et InSTI.

Multiplication des options en entretien

« Les contrôles plasmatiques montrent que l’observance est bonne. Les patients sont très adhérents au schéma intermittent. Certains sont d’ailleurs très heureux de cette option qui les laisse souffler’, ‘oublier’ un peu la maladie pendant le week-end, explique le Dr Landman. En 2019, les études Tango et Sword ont ouvert la voie à une bithérapie d’entretien par dolutégravir/lamivudine (DTG/3TC), agréée depuis en Europe aux États-Unis. Aujourd’hui l’étude ANRS-Quatuor vient ajouter une seconde alternative : la trithérapie intermittente. Cette option réduit de 42 % le coût du traitement antirétroviral, réduit sûrement sa toxicité et, cerise sur le gâteau, permet de lever un peu le couvercle de la charge mentale liée au traitement quotidien ».

Exergue : une réduction significative des coûts de traitement, associée à une amélioration de la tolérance

Entretien avec Roland Landman (CHU Bichat, Paris), avec Pierre de Truchis, coinvestigateur principal, Hôpital de Garches

(1) R Landman et al. Abstract 419, Croi 2021

Pascale Solère

Source : Le Quotidien du médecin