Vaccination anti-Covid : quels leviers d'action ?

Par
Publié le 12/11/2021
Article réservé aux abonnés
Polymédication, défiance et incapacité à prendre une décision, tels sont les facteurs favorisant le refus de la vaccination contre le Covid-19. A contrario, le recours habituel au vaccin antigrippal et une bonne compréhension des informations sont des facteurs d’acceptation. Décryptage de ces résultats de l’enquête PUGG 2021, afin de trouver des leviers d'action à la campagne de rappel.
Si la prise de décision était autonome,  la vaccination était acceptée dans 74 % des cas

Si la prise de décision était autonome, la vaccination était acceptée dans 74 % des cas
Crédit photo : phanie

La vaccination contre le Covid-19 était cette année le thème de l’enquête annuelle Pratiques et usages en gériatrie et gérontologie (PUGG), portée par la Société française de gériatrie et de gérontologie (SFGG).

« L’objectif était de mieux comprendre et cerner les motivations à accepter ou refuser la vaccination contre le Covid-19 afin d’en tirer des leçons pour la campagne de rappel », explique le Pr Cédric Annweiler, qui précise que l'enquête n’avait pas pour objet d’analyser le taux de vaccination.

Quelque 323 résidents en Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ou en Unité de soins de longue durée (USLD) ont répondu à un questionnaire, le contact ayant été établi via le médecin coordonnateur chargé de proposer cinq résidents au maximum (jusqu’à deux ayant accepté le vaccin et jusqu’à trois ayant refusé le vaccin). L’enquête s’est déroulée en juin, juillet et août 2021.

Au total, le panel comportait 179 résidents qui ont accepté la vaccination (55 %) et 144 qui l’ont refusée (45 %). Les caractéristiques démographiques étaient comparables entre les deux groupes : âge moyen de 89 ans, 70 % de femmes, 90 % de résidents en EHPAD et 10 % en USLD. Il s’agissait d’une population gériatrique représentative de la vraie vie, avec des scores groupe iso-ressources (GIR), correspondant au niveau de perte d'autonomie du sujet âgé inférieurs à trois en moyenne, une prévalence de troubles cognitifs majeurs affectant un répondeur sur deux, et un état de santé globalement dégradé.

Une question de conviction

Premier grand message issu de cette enquête : le principal facteur qui différencie les deux groupes est le recours habituel à la vaccination antigrippale. Ainsi, dans cette cohorte cas-témoins, 69 % des personnes se vaccinant habituellement contre la grippe ont accepté la vaccination anti-Covid, contre seulement 11 % chez les résidents qui ne se vaccinent habituellement pas contre la grippe. La conviction personnelle vis-à-vis de l’intérêt de la vaccination est donc le principal facteur d’acceptation ou de refus du vaccin contre le SARS-CoV-2.

L'état de fragilité en cause

Le deuxième paramètre à l’origine d’un refus du vaccin anti-Covid était l’existence d’un état de fragilité ou de santé instable. Ainsi, parmi les résidents qui ne se vaccinent habituellement pas contre la grippe, la polymédication était associée à un refus de la vaccination contre le Covid-19 (4 % de vaccinés en cas de polymédication, contre 22 % en l’absence de polymédication). Ce sont donc plutôt les personnes avec des polymorbidités, donc les plus à risque de formes graves et de décès dus au Covid-19, qui ont refusé le vaccin, possiblement parce qu’elles jugeaient leur état de santé trop fragile ou instable.

La capacité de prise de décision

Enfin, dans le groupe de résidents se vaccinant habituellement conte la grippe, le premier paramètre associé à l’acceptation ou non du vaccin anti-Covid était la capacité à recevoir des informations et à prendre une décision. Si un résident ne comprenait pas ou mal les informations, ou si cette décision devait être prise par l’entourage, la vaccination n’était acceptée que dans 50 % des cas, contre 74 % en cas de prise de décision autonome. « Il faut donc un effort de pédagogie auprès des résidents et de leur famille, souligne le Pr Annweiler. La peur joue aussi un rôle important (voir encadré), mais elle a une forte composante irrationnelle sur laquelle l’impact de l’information est incertain. En revanche, nous disposons aujourd’hui de données solides sur l’innocuité des vaccins et leur très grande efficacité à prévenir les formes graves de la maladie. On peut agir sur l’analyse de la balance bénéfice/risque par une plus ample information auprès des familles des résidents les plus fragiles, qui sont les plus à mêmes de tirer des bénéfices de la vaccination ».

D’après un entretien avec le Pr Cédric Annweiler, administrateur de la SFGG et chef du service de gériatrie au CHU d’Angers.

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin