Alors que la rétinopathie diabétique a longtemps été considérée comme une complication microvasculaire tardive de la maladie, de plus en plus de travaux tendent à démontrer que c'est en fait une complication précoce du diabète. Et si c'est bien le cas, des stratégies thérapeutiques basées sur une neuroprotection pourraient être bien utiles non seulement pour freiner ou stopper l'évolution d'une rétinopathie débutante mais aussi, en amont, pour prévenir son développement chez des patients encore indemnes de toute atteinte rétinienne. Or dans les mécanismes à l'œuvre sont impliqués plusieurs facteurs neuroprotecteurs sous-exprimés au sein de la rétine dans le diabète, dont la somatostatine.
Somatostatine versus brimodinine
C'est pourquoi une vaste étude européenne, l'étude EUROCONDOR, s'est attachée à tester l'impact l'administration en gouttes oculaires d'une part de la somatostatine, d'autre part du brimodinine, tous deux versus placebo, chez près de 500 diabétiques depuis au moins 5 ans dont la moitié présentait un score ETDRS inférieur à 20 (absence de micro-anévrisme) et l'autre moitié un ETDRS compris entre 20 et 35 associé à au moins un micro-anévrisme.
Ils ont été randomisés en trois bras et traités deux fois par jour par des gouttes oculaires de somatostatine à 1 %, de brimonidine à 0,2 % (agréée dans le glaucome) ou par placebo, durant 2 mois. Et le fonctionnement neurologique a été suivi et quantifié en considérant que l'observation de six hexagones ou plus altérés au TIT-mfERG signait une neurodysfonction rétinienne.
Des résultats inattendus
À l'issue de deux ans de suivi, les données montrent que les deux drogues testées permettent de ralentir la progression de la neurodégénérescence chez les patients déjà relativement atteints à l'inclusion (35 % des patients). C'est une excellente nouvelle même si de plus amples études sont indispensables avant de pouvoir confirmer l'efficacité et l'innocuité de ce type de traitement en particulier de la somatostatine qui a un bien meilleur profil de tolérance que la brimonidine dans cet essai. On est en effet face à une toute nouvelle piste thérapeutique pour la prise en charge la rétinopathie diabétique.
Dans le même temps, une partie des résultats d'EUROCONDOR est tout à fait inattendue.
L'examen par électrorétinographie multifocale (mfERG) a montré que les deux tiers de ces 450 diabétiques de type 2, tous diabétiques depuis au moins 5 ans, n'avaient aucun signe de neurodysfonction. Et chez ceux-là, aucun des traitements testés n'a montré une quelconque efficacité. Ce qui sous-entend, d'un point de vue physiopathologique, que l'on a deux types de diabétiques de type 2. Des diabétiques chez lesquels la neurodégénérescence apparaît très précocement et est probablement au cœur de la pathogenèse de la neuropathie. Mais aussi des diabétiques, moins nombreux, chez lesquels n'est retrouvée qu'une micro-angioptahie sans aucun signe de neurodégénération. Il y a donc manifestement deux phénotypes de rétinopathies diabétiques. Ce qui ouvre la voie non seulement à des recherches qui pourraient éclairer la physiopathologie de cette complication mais aussi à de nouvelles pistes thérapeutiques.
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