À LA SUITE des campagnes de prévention de la mort subite du nourrisson par le couchage sur le dos organisées à partir de 1994, le nombre de cas a diminué de façon spectaculaire, de 1 133 en 1993 à 451 en 1996. Actuellement, il s’établit autour de 250 par an et stagne depuis plusieurs années. Une enquête menée par l’Invs (Institut national de veille sanitaire) sur les morts inattendues de nourrissons (MIN) de moins de 2 ans et publiée en 2011 [1] montre que, parmi les décès d’enfants de moins de 1 an qui ont pu être expliqués (un tiers de ces décès), un quart était lié au couchage et/ou à la literie et aurait pu être évité : enfants coincés entre le matelas trop petit pour le lit et le bord du lit en toile, enfants asphyxiés le nez dans le matelas, en couchage ventral sur un support mou (couvertures, oreillers, matelas d’adultes) ou enfouis sous une couverture ou une couette.
Dans le groupe des morts inattendues non expliquées après investigation, un certain nombre d’enfants présentaient cependant un ou plusieurs facteurs de risque, en particulier les deux tiers d’entre eux dormaient dans un environnement non sécurisé (couchage sur le ventre ou sur le côté, couverture, couette ou oreiller dans le lit, lit adulte ou canapé, partagé ou non, matelas mou ou pièce trop chaude). Les auteurs de cette enquête plaidaient pour que les campagnes de prévention en faveur du couchage sécurisé des enfants, qui datent des années 1990, soient renouvelées ; ils n’ont manifestement pas été entendus.
Les conseils de base pour le couchage.
Le nourrisson doit dormir sur le dos pour tous les sommeils, celui de la sieste comme celui de la nuit, dans un lit à barreaux (le lit parapluie peut être utilisé comme lit d’appoint en gardant le matelas intégré dedans et sans en ajouter un supplémentaire), sur un matelas ferme, aux bonnes dimensions, recouvert d’un drap-housse, dans une turbulette si la température le nécessite, sans couverture, ni couette. Les tours de lits sont à proscrire. Pour l’Académie américaine de pédiatrie [2], non seulement les tours de lit n’offrent aucune protection contre les chocs mais surtout ils comportent un risque de suffocation et de strangulation.
La température de la chambre doit être comprise entre 18 et20°.
L’exposition au tabagisme (en ante et en postnatal) est un facteur de risque important de mort subite. L’allaitement au sein est associé à une réduction de ce risque.
Pour prévenir la plagiocéphalie qui peut être favorisée par la position dorsale de sommeil, on peut faire jouer l’enfant sur le ventre dans la journée et, lorsqu’il est dans son lit, l’inciter à tourner la tête d’un côté ou de l’autre, avec un mobile par exemple.
Les coussins cale-tête proposés pour « prévenir la tête plate » n’ont aucun intérêt démontré et sont à proscrire. Il en est de même des divers appareils de surveillance, audio, vidéo, qui ne sont que de fausses sécurités
Proscrire le cosleeping.
Le partage de la chambre est recommandé mais non le partage du lit (cosleeping ou sommeil partagé), très à la mode aujourd’hui notamment pour les bébés nourris au sein. Ce sommeil partagé comporte en effet des risques mortels d’enfouissement, d’hyperthermie…, voire d’écrasement thoracique par le parent. Le sommeil partagé est d’autant plus dangereux que l’enfant est âgé de moins de trois mois, que le parent dont l’enfant partage le lit est fumeur, obèse, qu’il a bu de l’alcool ou qu’il est fatigué, ce qui est le cas de la majorité des mères de jeunes enfants dont le fameux sixième sens n’est pas toujours opérant.
Une méta-analyse récente de 11 études cas-contrôles portant sur un total de 2 464 cas de mort subite du nourrissons (MSN) et 6 495 contrôles [3] atteste bien du risque lié au cosleeping : 28,8 % des nourrissons victimes de MSN partageaient le lit de leurs parents contre 13,3 % des contrôles, soit une majoration du risque de 2,89 (intervalle de confiance à 95 % IC : 1,99-4,18). Ce risque est très nettement augmenté pour les nourrissons de moins de 12 semaines.
Informer les parents.
En l’absence de campagnes publiques d’information sur le risque de mort subite lié au couchage, c’est aux professionnels de santé, particulièrement aux médecins généralistes et aux pédiatres, d’informer les parents. La tâche n’est pas facile car il s’attache à cette question une certaine culpabilité d’avoir dans le passé délivré de mauvais conseils. Par ailleurs, informer sur ce sujet prend du temps et oblige à aller à l’encontre des messages délivrés implicitement par la publicité et des préconisations du marché de la puériculture. Mais ce travail d’information est fondamental. Tous les parents ont entendu parler de la mort subite et la redoutent. Il ne faut pas craindre d’aborder cette question avec eux. Recevoir des conseils de prévention de la part d’un professionnel, loin de leur faire peur, au contraire, les rassure.
Des dépliants et affiches de prévention peuvent être téléchargés ou commandés sur le site de l’Association Naitre et Vivre, www.naitre-et-vivre.org
Références :
[1] Bloch J, Denis P, Jezewski-Serra D. Les morts inattendues de nourrissons de moins de 2 ans. Enquête nationale 2007-2009. Institut de veille sanitaire ; 2011. 56 p.
[2] American Academy of Pediatrics : SIDS and other sleep-related infant deaths : expansion of recommendations for a safe infant sleeping environment. Pediatrics 2011; 128 (5): 1030-1039.
[3]Vennemann MM et coll. Bed sharing and the risk of sudden infant death syndrome : can we resolve the debate ? J Pediatr 2012; 160:44-8.
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