La pente de progression de la maladie rénale est éminemment variable. Ces patients peuvent être stabilisés, mais sont à risque de complications rénales et cardiovasculaires et d’événements indésirables (tels qu’une hyperkaliémie, une poussée d’insuffisance cardiaque ou une insuffisance rénale aiguë), notamment à l’occasion d’un facteur déstabilisant comme une forte chaleur, de la fièvre, une gastro-entérite aiguë ou une injection de produit de contraste.
Malheureusement, les paramètres de suivi cliniques et biologiques de l’insuffisance rénale chronique (IRC) sont recueillis avec un certain retard par rapport à l’événement. D’où l’intérêt de la télésurveillance qui permet de transmettre sans délais ces indicateurs et de réduire le temps de prise de décision par l’équipe soignante. En collaboration avec Orange®, une étude randomisée avec groupe contrôle d’évaluation du télésuivi de l’IRC a été mise en place par le CHU de Grenoble et les centres de santé des associations à but non lucratif CALYDIAL (Centre associatif lyonnais de dialyse) et AGDUC (Association grenobloise pour la dialyse des urémiques chroniques). Les inclusions se sont terminées en décembre 2010 et le télésuivi a été réalisé à domicile au premier semestre 2 011 chez la moitié des 80 patients hypertendus (40 à Grenoble et 40 à Valence) et/ou diabétiques de type 2 en IRC de stade 3-4 munis d’une e-tablette (application Telus paramétrée pour le protocole de l ’étude, système pilote RTC de Orange). Les patients devaient remplir au moins une fois par semaine un questionnaire sur leur état de santé et ce pendant six mois. Les questions portaient notamment sur la sensation de fatigue, l’existence d’une dyspnée, la modification du traitement et sur différents paramètres simples comme la pression artérielle, la glycémie ou le poids. Pour chaque paramètre des seuils d’alertes (faible, moyenne, haute) étaient définis. Par exemple, pour la pression artérielle systolique, une infirmière appelait le patient pour des valeurs comprises entre 130 et 160 mm Hg et, pour des valeurs supérieures, l’infirmière devait référer au néphrologue qui prenait alors les décisions s’imposant (grâce à un centre d’appel 24h/24).
Des patients rassurés
L’un des premiers enseignements de l’étude est sa très grande acceptabilité par les patients, puisque seulement quatre dossiers n’ont pas pu être exploités. Dans plus de 80 % des cas, le recueil des données, qui demandait environ 10-12 minutes au patient, était exhaustif ; il n’a pas été noté de difficultés techniques particulières pour les patients, âgés en moyenne de 70 ans et issus de toutes les classes socioprofessionnelles. Il faut également noter que les patients étaient très rassurés de pouvoir communiquer avec les soignants.
"Toutes les données n’ont pas encore été exploitées, en particulier celles concernant la fonction rénale, mais le deuxième enseignement de l’étude est la fréquence des événements (requêtes de la machine), qui a été en moyenne de 2,8 par patient au cours des six mois de suivi et pour lesquels il a fallu adapter la prise en charge. Le traitement a été modifié dans environ 20 % des cas, ce qui témoigne du caractère non optimal du traitement en suivi conventionnel », note le Pr Zaoui.
Au niveau du "temps professionnel de santé", la préparation de l’étude a impliqué 3 médecins, 1 cadre de santé et 2 coordinateurs. Lors du suivi, l’infirmière de coordination consacrait chaque semaine une demi-journée pour la gestion des alarmes et une à deux heures pour appeler les patients. "Pour le médecin, la charge de travail a été de l’ordre de 2 heures par semaine, ce qui est très efficient pour 20 patients télésuivis, comparativement au suivi en consultations. Le relais sur l’astreinte 24h/24 n’a pas été nécessaire, nous n’avons eu que des appels de jour".
Deux autres projets de télésuivi sont en cours d’élaboration.
Dr ISABELLE HOPPENOT
D’après un entretien avec le Pr Philippe Zaoui, clinique de néphrologie, CHU, Grenoble, Président du Conseil d’administration de l’AGDUC.
Article suivant
La télésurveillance intégrée au système de soins
Le bénéfice du télésuivi des insuffisants rénaux à risque
La télésurveillance intégrée au système de soins
Succès de l’autogestion des antivitamines K
La télésurveillance des insuffisants cardiaques pose ses jalons
Le succès d’un camion itinérant dans les zones isolées de la région Midi-Pyrénées
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024