De plus en plus d’études font état de symptômes respiratoires persistants après une infection par le SARS-CoV-2. Est-ce que cela était attendu ?
Pr Chantal Raherison : En pneumologie, on sait depuis longtemps qu’après une infection respiratoire virale ou bactérienne, certains patients développent des séquelles, que ce soit en post coqueluche, post rougeole, post grippe, etc. Pour le Covid, on observe la même chose avec, semble-t-il, une atteinte respiratoire plus prononcée. Même s’il est encore trop tôt pour chiffrer le phénomène car les données sont en train d’être colligées, le suivi clinique des patients montre en effet qu’un certain nombre d'entre eux gardent des séquelles fonctionnelles avec une dyspnée parfois marquée pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Et ce même chez des patients étiquetés peu sévères initialement et qui ne sont pas passés par la case hôpital.
Le risque de fibrose est-il avéré ?
Pr C. R. : Il y a effectivement des patients qui présentent des réticulations au scanner mais il est encore trop tôt pour savoir si cela évoluera vers des fibroses. Compte tenu du nombre de personnes concernées par le Covid, notre crainte est que cela fasse le lit d’une nouvelle maladie respiratoire chronique, comme ce que l’on a connu avec les DBB post rougeole ou post coqueluche. Ceci dit, de nombreux patients ont une atteinte fonctionnelle sans anomalie objectivée au scanner…
Qu’est-ce que cela implique en pratique, notamment en médecine générale ?
Pr C. R. : Je crois qu’il faut penser au Covid en se disant que ça peut être une maladie chronique. En médecine générale, il nous semble important que les patients ayant eu une infection Covid puissent avoir un bilan minimum avec l’évaluation de la dyspnée (via par exemple une échelle EVA comme celle de la douleur) et la recherche d’une limitation des activités ainsi qu’une mesure de la saturation. Il faut se méfier des patients qui se plaignent de fatigue car cela reflète en fait, souvent, une véritable dyspnée. À partir du moment où il y a une limitation de l’activité qui apparaît, ou si la saturation de repos est inférieure à 96 %, le patient doit être adressé à un pneumologue pour un bilan respiratoire plus poussé. Il est important d'évaluer ces patients car si on ne les prend pas en charge précocement, ils vont être impactés pendant longtemps alors qu’on peut les améliorer assez rapidement via la kinésie respiratoire ou la réhabilitation.
* présidente de la Société de pneumologie de langue française
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