Hépatite A chez des HSH à Rouen : les leçons d'une épidémie

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Publié le 18/07/2017
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Crédit photo : PHANIE

Alors que plusieurs pays européens font état depuis début 2016 de la circulation du virus de l'hépatite A, en particulier des souches de génotype IA affectant les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH), 30 cas d'hépatite A recensés à Rouen (Normandie), ont été notifiés à Santé publique France, entre le 19 décembre 2016 et le 30 avril 2017.

Nathalie Nicolay et coll. décrivent dans le « Bulletin épidémiologique hebdomadaire » (« BEH ») publié ce mardi, cette épidémie survenue dans un département où l'incidence est habituellement faible (10 cas notifiés en 2016). Parmi les 30 cas notifiés, 21 étaient des cas épidémiques confirmés (20 souches de génotypes IA VRD_521_2016, souche isolée dans des épidémies similaires au Royaume-Uni, en Allemagne, et aux Pays-Bas, et 1 de RIVM HAV16_090), un cas était probable (sérum non reçu par le Centre national de référence du VHA), et deux étaient sporadiques (avec isolement d'une souche de génotype IB). Ces deux derniers ont déclaré avoir voyagé en Afrique.

Sur les 30 cas, 18 cas masculins (dont 17 confirmés, et le probable) se disent HSH. Sur les 13 questionnaires de la cellule d'intervention en région (Cire) Normandie, de Santé publique France (SPF), une majorité (9) déclare des rapports avec des partenaires occasionnels, anonymes, et en groupe, rencontrés sur des sites de rencontre et applications mobiles. Seulement 3 cas confirmés, et le probable, ont déclaré recourir au préservatif systématiquement. Et 4 cas ont rapporté avoir voyagé en Europe les deux mois précédant les premiers symptômes (Espagne, Luxembourg, Italie, Angleterre).

Par ailleurs, 5 cas présentaient une co-infection avec le VIH, dont 3 l'avaient découvert lors du dépistage au VHA.

Aucun cas n'était vacciné contre le virus de l'hépatite A, malgré la proposition faite par le passé à 4 d'entre eux.

Prévention ciblée et 300 vaccins débloqués

Quelle est la pertinence d'interroger le patient sur d'éventuelles pratiques à risque ? L'article soulève la question. C'est en effet la déclaration spontanée d'une personne infectée, qui a eu un rapport avec un homme ayant eu une hépatite A, qui a facilité la détection des cas groupés début janvier 2017, lit-on. En France, bien que la Déclaration obligatoire (DO) ne le prévoie pas de façon systématique, « il est important de rechercher cette exposition à risque chez les hommes », indiquent les auteurs, Maggie Le Bourhis-Zaimi et coll.

Autre sujet mis en lumière par cette épidémie, la vaccination contre le VHA dans un contexte marqué par des tensions d'approvisionnement, en l'occurrence depuis mai 2016. Une première épidémie de VHA chez les HSH parisiens en 2000 avait conduit à l'extension de la recommandation vaccinale aux HSH. Mais en raison des tensions d'approvisionnement, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) la recommande après un test sérologique préalable prouvant l'absence d'immunisation. De son côté, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) préconise de prioriser la vaccination chez les HSH vivant dans les zones de foyers épidémiques en cours.

Un second pic fin février

Dans l'épidémie rouennaise, après une première campagne de sensibilisation dès janvier des médecins (rappel de l'importance de la DO) et des HSH, via les associations, la survenue d'un second pic épidémique fin février a conduit les autorités à mettre en place une campagne de vaccination ciblée, dans les centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic (CeGIDD), les centres médico-sociaux, les associations, et sur le parking d'un lieu de rencontre, entre le 22 mars et le 30 avril. L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a ainsi débloqué 300 vaccins.

Une évaluation de la campagne de vaccination est en cours d'évaluation. Mais les mesures de prévention, avec mise en place d'une campagne de vaccination ciblée en lien avec les acteurs associatifs et les relais communautaires, se sont révélées indispensables pour diminuer la circulation du virus dans cette population et circonscrire l'épidémie, concluent les auteurs. Depuis la mi-avril, 3 nouveaux cas épidémiques probables tous HSH et un cas sporadique ont été déclarés à SPF.


Source : lequotidiendumedecin.fr
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