En France, 1 adulte sur 5 et 1 enfant sur 10 consomment au moins occasionnellement un complément alimentaire ou des vitamines et minéraux sous formes médicamenteuses*. Depuis la mise en place en 2009 du dispositif national de nutrivigilance, l’ANSES a enregistré plus de 1 500 déclarations d’effets indésirables dont 76 % concernaient des compléments alimentaires et 24 % des aliments enrichis ou des denrées destinées à une alimentation particulière.
Parmi l’ensemble de cas déclarés à l’agence, 52 % émanent des industriels et un peu plus de 45 % des professionnels de santé, essentiellement par l’intermédiaire des centres régionaux de pharmacovigilance (316 cas) et des centres anti-poison et de toxicovigilance (248 cas). Si les hôpitaux (65 cas), les pharmacies (41 cas) et les médecins (27 cas) semblent en retrait au niveau des remontées directes d’effets indésirables, le tableau est moins noir qu’il n’y paraît.
« Beaucoup de médecins libéraux, vraisemblablement par méconnaissance du dispositif ou par souci de simplicité ont l’habitude de déclarer à la pharmacovigilance ou à la toxicovigilance qui enregistrent le cas et nous l’envoient », explique Franck Fourès, directeur adjoint en charge de la santé-alimentation à la Direction de l’évaluation des risques de l’ANSES. En principe, l’espace web Nutrivigilance** permet à un professionnel de santé ou une autre personne à titre individuel de déclarer facilement un effet indésirable susceptible d’être lié à la consommation de complément alimentaire, d’aliments ou boissons enrichis, de nouveaux aliments ou nouveaux ingrédients non traditionnels en Europe ou des produits destinés à l’alimentation de populations particulières (nourrissons, sportifs, patients souffrant d’intolérance alimentaire).
Vers un portail unique
Pour faciliter davantage la démarche déclarative, l’ANSES envisage de créer prochainement un portail commun avec un formulaire unique aux différentes vigilances entrant dans son champ de compétences. L’agence entend par ailleurs remobiliser les professionnels de santé – en particulier les médecins – pour faire remonter des cas d’effets indésirables qu’ils suspecteraient d’être notamment liés à la consommation de compléments alimentaires. « Chaque fois qu’une symptomatologie est dépourvue d’explication évidente infectieuse, ou qui tombe sous le sens clinique général, le médecin doit rechercher une cause atypique. Vu que les compléments alimentaires sont des produits devenus très courants, il faut que le médecin pense à intégrer cela dans sa réflexion », souligne Franck Fourès. Pour sensibiliser les praticiens, l’ANSES va lancer cette année une campagne d’information dans la presse professionnelle tout en poursuivant l’effort de présentation de son dispositif dans les facultés de médecine. Son nouveau système de retour d’information aux déclarants – « beaucoup plus complet » – doit aussi contribuer à impliquer davantage les professionnels.
Un traitement en 48 heures
Après chaque signalement, l’ANSES dispose de 48 heures ouvrées pour traiter les déclarations. En dehors des cas d’alerte – assez rares – où les rapports d’expertise doivent être transmis aux autorités dans les 24 à 48 heures, la procédure classique est plus longue.
Les médecins experts ont alors deux à trois semaines pour rendre leur rapport au groupe de travail spécialisé nutrivigilance qui analyse in fine la déclaration. À l’issue de ce processus, 33 % des déclarations sont jugées suffisamment renseignées pour faire l’objet d’une analyse approfondie. Jusqu’à présent, neuf avis scientifiques spécifiques ont été rendus par l’agence. Trois nouvelles évaluations concernant les compléments alimentaires destinés aux femmes enceintes et aux sportifs, et ceux contenant de la spiruline doivent être publiées au cours du premier semestre.
Tout dévoiler ?
Parmi les cas déclarés jugés recevables depuis la mise en place du dispositif de nutrivigilance, 76 % concernent les compléments alimentaires, et en premier lieu les produits minceur, capillaire et hypocholestérolémiant. Les principaux effets indésirables déclarés relèvent de l’hépatologie, de la gastro-entérologie et de l’allergologie. Pour encore plus de transparence, l’ANSES va étudier en 2015 l’opportunité de rendre publiques les déclarations et ses conclusions « au-delà des cas intégrés » dans les avis déjà consultables sur son site internet. « Nous voulons privilégier la transparence tout en faisant quelque chose d’utile sans être angoissant ou pénalisant pour des produits en cas de mauvaise interprétation par des personnes qui n’ont pas toute la connaissance du dispositif », indique Franck Fourès. L’agence devrait statuer à ce sujet d’ici à la fin de l’année.
* Selon l’étude individuelle nationale sur les consommations alimentaires (INCA2) menée par l’ANSES en 2006-2007.
** pro.anses.fr/nutrivigilance/
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