Par décision partagée, certains comprennent qu’elle appartient au patient. Pas du tout ! La HAS, dans un document publié l’an dernier, définit clairement le processus partagé et propose des conseils destinés aux professionnels : « le professionnel de santé et le patient partagent de manière bilatérale une information médicale, notamment les éléments de preuve scientifique ; le patient reçoit le soutien nécessaire pour envisager les différentes options possibles et exprimer ses préférences… ; le choix éclairé entre les différentes options est effectué et accepté mutuellement par le patient et les professionnels de santé » (1).
« Le dispositif a pour l’instant du mal à se généraliser en France, souligne Giovanna Marsico (Villejuif). Peut-être va-t-il à l’encontre de certains codes culturels ? Mais le concept fait son chemin et certaines équipes de recherche ont déjà bien avancé sur le sujet ».
Certes, une avancée majeure s’est effectuée en France avec la mise en place des réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP), qui ont permis d’alléger la responsabilité individuelle du clinicien par le point de vue de différents spécialistes. Après concertation des professionnels, le patient reçoit une proposition thérapeutique, libre à lui de l’accepter ou pas. « Le patient n’assiste pas aux RCP, note G. Marsico, mais il existe des moyens de l’impliquer en amont en évaluant ses préférences, ses valeurs, ses attentes et ses capacités réelles à suivre le projet thérapeutique ».
Grâce à des dispositifs d’aide à la décision, le professionnel doit pouvoir permettre au patient d’intervenir dans la démarche thérapeutique. On sait que certains patients ne veulent pas s’impliquer, mais s’interroge-t-on vraiment sur leur volonté réelle ? Le patient doit être acteur de sa santé, non seulement dans la mise en route d’un traitement mais dans l’ensemble du parcours de soins. La prise en charge en ambulatoire, par exemple, ne peut se faire qu’avec un accompagnement d’aide à la décision. « Ainsi, explique G. Marsico, il y a 40 % des femmes qui arrêtent l’hormonothérapie pour cancer du sein. Pour les effets adverses probablement, mais également parce qu’on ne les a pas suffisamment prévenues de l’importance de ce traitement et ce qu’il implique comme diminution de leur qualité de vie ».
Du sens au traitement
La décision partagée modifie le référentiel culturel de la maladie. « Quand on parle du cancer, on parle en termes de lutte, d’arsenal thérapeutique, note G. Marsico. Que des références guerrières ! Ce peut être efficace sur certains patients mais ceux qui ne guérissent pas sont-ils des mauvais combattants, des victimes ? Un combat ne peut être mené seul, il faut être accompagné ». Le patient engagé dans une maladie grave doit être doté d’outils indispensables pour suivre le traitement dans les meilleures conditions possibles. Il doit être capable de prendre en compte tous les aspects de sa maladie et notamment de comprendre et de participer aux choix thérapeutiques. Les mots du professionnel doivent être clairs mais le patient ne peut prendre seul la responsabilité du choix ; le professionnel est là, avec ses responsabilités, pour l’aider, l’accompagner, lui expliquer. « Il y a encore des patients admis dans des unités de soins palliatifs avec qui les éventuels échecs des traitements n’ont jamais été abordés ! », déplore Giovanna Marsico. Reste aujourd’hui à développer le concept chez les professionnels de santé.
Entretien avec Giovanna Marsico, directrice de la plateforme cancer contribution, responsable du pôle citoyen de l’association Cancer Campus à Villejuif.
(1) HAS. Patients et professionnels de santé : décider ensemble. État des lieux. Octobre 2013
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