LE QUOTIDIEN : Quelle est la dynamique des CPTS ?
DAVID GUILLET : En ce moment la demande est très forte. Ce mode d’exercice plaît de plus en plus. 440 conventions sont signées avec l’Assurance-maladie, 780 sont en projet. Les pouvoirs publics ont pour objectif d’atteindre le chiffre de 1 000 CPTS fin 2023. Ça marche très fort. Les professionnels de santé et paramédicaux ont un intérêt mutuel à travailler ensemble, de façon coordonnée, et plus chacun dans son coin. Si l’un d’entre nous est malade, ou s’il a un problème ponctuel, il peut facilement trouver un confrère pour le remplacer. Notre travail est beaucoup plus transversal, en lien avec le médico-social et l’hôpital.
Quel bilan faites-vous à la fédération des CPTS ?
Le démarrage des CPTS a eu lieu en 2018, et s’est traduit dans le programme santé d’Emmanuel Macron « Ma santé 2022 ». Pour la première fois, un financement de l’Assurance-maladie était proposé, en fonction d’aspects purement populationnels. Quatre tailles de CPTS ont été définies (de 1 à 4), en fonction du nombre de personnes couvertes, qui vont de 40 000 à 300 000 habitants. 70 % des CPTS sont de taille 2 ou 3, soit en moyenne 83 000 habitants.
Quelle proportion de la population est maintenant couverte par une CPTS ?
Ce mouvement est en pleine expansion. Selon nos estimations, 45 millions d’habitants sont concernés par une CPTS. Dans certains départements, cela avance très vite, avec 97 % de la population dans le Centre-Val-de-Loire, 100 % à La Réunion, mais seulement 25 % dans le Grand-Est et la Normandie.
Comment cela se passe-t-il concrètement ?
Dans la CPTS où j’exerce, en sud-Mayenne, nous avons eu très rapidement deux remplaçants quand un de nos médecins est parti, car notre fonctionnement plaît. Nous avons un logiciel commun, qui permet à chacun des professionnels de comprendre ce que les autres font. Cela permet faire de la prévention, du dépistage, de la formation des jeunes. C’est un atout pour une meilleure réponse aux besoins de santé publique de la population. En France on a longtemps eu du retard à ce sujet, il est temps de le combler.
Pourtant le mot « CPTS » ne parle pas à la population ? Peuvent-ils vous contacter directement ?
C’est un vrai sujet ! Le mot lui-même n’est pas très parlant, il faudrait le rendre plus lisible. Faut-il créer un numéro dédié, ou un secrétariat unique ? La question se pose. Mais en même temps, nous n’avons pas pour vocation d’être appelé directement par la population, car la CPTS est avant tout une organisation collective des médicaux et paramédicaux, en interface avec l’Assurance-maladie, les autres pouvoirs publics, et les Ordres, sur un territoire donné.
À la fédération, êtes-vous favorable à la proposition de loi Valletoux, qui veut que tous les soignants et paramédicaux soient membres de droit des CPTS ?
Nous ne sommes pas favorables à l’obligation, à toute forme de coercition. C’est contre-productif. Ce n’est pas comme si ce mouvement ne marchait pas, et qu’il fallait absolument remplir les effectifs. La dynamique est là. On risque au contraire de braquer les médecins en leur disant que c’est obligé d’en faire partie. S’ils le prennent comme une obligation, ça ne marchera pas.
Vous êtes vous-même infirmier, à la tête de la fédération des CPTS. Est-ce un symbole ?
Oui c’est symbolique, que je sois infirmier, à la tête de la fédération des CPTS. Mais ce n’est pas une rupture. Je m’inscris dans la droite ligne de mon prédécesseur, le docteur Claude Leicher, ancien président de MG France. Notre seul objectif est de bien faire travailler les professions de santé et paramédicales, à l’échelle du territoire. Sur le terrain, nous agissons bien, ensemble, médecins, infirmiers, pharmaciens…, en coordination avec les élus. Certains proposent des logements pour que des professionnels viennent s’installer. On est de moins en moins isolé. C’est la meilleure réponse face aux déserts médicaux.
Quels échos avez-vous eu du travail en cours, au ministère, sur l’évaluation des CPTS ?
Ce qui remonte du terrain, c’est qu’il nous faudrait un appui en ressources humaines un peu plus important, pour que cela marche encore mieux. Nous avons aussi constaté que parfois la ventilation des enveloppes budgétaires ne correspond pas à la réalité des flux de population. Les CPTS à Paris ou dans les régions côtières peuvent se trouver en difficulté car elles voient passer des flux de population très importants, supérieurs à ce qui est inscrit dans les tableaux prévisionnels des statistiques. Enfin, les relations entre les CPTS et les CPAM sont parfois à revoir, car certaines caisses se comportent de façon un peu trop tatillonne. Mais, en général, ce système marche bien, et est très positif. Certains professionnels libéraux peuvent être assez réticents au départ, en estimant qu’il s’agit d’un carcan bureaucratique. Puis quand ils font partie d’une équipe, ils se rendent compte que ce système a beaucoup d’avantages et est performant.
Exergue : 70 % des CPTS sont de taille 2 ou 3, soit en moyenne 83 000 habitants.
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