C’est le serpent de mer de la formation continue depuis au moins vingt ans. Les sanctions en cas de manquement, on en parle depuis longtemps, mais personne n’a jamais réussi à les mettre en place… Voté en première lecture la semaine dernière par l’Assemble nationale, l’amendement 28 du projet de loi santé visant à réformer le DPC rappelle néanmoins sans équivoque que « des sanctions à caractère financier ou administratif peuvent être prises en cas de manquements constatés dans la mise en œuvre des actions et programmes ».
Et, comme pour être plus claire, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, n’a pas esquivé le sujet lors des discussions dans l’Hémicycle au moment du vote. « Il y aura également un processus d’évaluation des organismes et des programmes ainsi qu’un dispositif de sanction en cas de manquement ». Un décret en Conseil d’État définira selon le texte le processus d’évaluations des organismes de formation, des programmes, mais aussi du dispositif de sanction en cas de carence de la part de médecins.
« Rester attaché à l’obligation »
Pourtant au départ, tel que le projet de loi était écrit, rien n’indiquait de façon explicite que des sanctions contre les médecins étaient prévues pour ceux qui ne rempliraient pas l’obligation de DPC. Cet amendement montre que l’idée n’a pas disparu. Sanctions ? Pour le Pr Robert Nicodème (photo), président de la section formation et compétence au Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM), pour qui les sanctions ne sont pas l’élément central du dispositif, ce qui est important c’est « de rester attaché à l’obligation »,. « Le rôle de l’Ordre est essentiel dans le DPC parce que l’obligation majeure, c’est de maintenir sa compétence et le DPC est un des moyens de veiller à cela », explique-t-il. Autrement dit, les sanctions éventuelles relèveraient du fait de l’insuffisance professionnelle et non pas directement d’une absence de DPC. « Un professionnel de santé peut se trouver en état d’insuffisance professionnelle et donc passer devant l’Ordre. S’il n’a pas fait son DPC, cela peut être un indicateur mais ce n’est pas cela qui déterminerait en soi son insuffisance professionnelle », précise le Pr Nicodème.
De fait, quelles que soient les dispositions spécifiques qui pourraient être prises pour s’assurer de l’obligation de DPC, les deux décrets issus de la loi HPST relatifs à la procédure de contrôle de l’insuffisance professionnelle et aux règles de suspension temporaire des médecins parus l’année dernière donnent déjà la possibilité aux ordres départementaux d’intervenir pour sanctionner la qualité des soins délivrée par les médecins. Ils n’ont pas été conçus initialement pour l’obligation de DPC.
Mais, néanmoins, un médecin qui ne remplirait pas son obligation de DPC peut, en principe, être convoqué par l’Ordre et être évalué par le collège des trois experts qui, ensuite, statuera sur le fait qu’il ait ou non réalisé un autre type de formation. Ces textes prévoient qu’en l’absence totale de formation, le collège lui précisera sur quel domaine il devra le faire, quitte à se voir temporairement interdit d’exercer dans un domaine précis jusqu’à prouver sa nouvelle mise à niveau. Le DPC n’est pas seul en cause : un médecin peut avoir réalisé son DPC et être évalué par l’Ordre comme « insuffisant professionnellement ».
Reste que, pour le Pr Nicodème, « ce qui est plus clair aujourd’hui avec la loi Touraine qu’avec la loi Bachelot, c’est que l’obligation est bien un indicateur ». Un sous-amendement a également été voté par les députés pour assurer à l’Ordre que c’est bien lui qui s’occuperait des procédures de contrôle. Un point sur lequel les ordinaux avaient besoin d’être rassurés. Une chose est sûre pour le président de la section formation-recherche du CNOM cette démarche de DPC est une « avancée majeure » car c’est selon lui une « étape vers la certification qui marque une évolution du métier que la société demande » et à laquelle le médecin ne semble plus pouvoir échapper.
Le retour des sanctions ?
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