Médecin, est-ce une profession exposée aujourd’hui ?
Alexis Wetterwald Oui, on est sur une profession qui est exposée dans la mesure où le médecin reste parmi les derniers acteurs qui interviennent dans les quartiers, les villages. Aujourd’hui quand on a un libéral qui est présent, il est reconnu par la population mais du fait de sa présence, il va être exposé. Mais il l'est sans doute moins qu’un service d’urgence, parfois appelé faute de médecin disponible. Moi, ce que je remarque c’est que ça se passe relativement bien quand les médecins sont bien intégrés et qu’ils ont une fibre sociale.
Pour vous il y a donc moins de risques de violence quand le médecin connaît bien ses patients ?
A. W. Bien sûr, il faut en revenir au médecin de ville intégré et proche de son territoire. Si on met en place un simple cabinet médical et qu’il n’y a pas d’attache au territoire, le médecin peut rapidement être une cible au même titre que n’importe quelle autre profession qui ne vivrait pas avec la population. Le lien social est essentiel, que ce soit en campagne ou en ville, l’acteur de santé participe à cette cohésion. A défaut, il rencontrera sans doute plus de difficultés.
Les mesures technologiques sont-elles un moyen selon vous de limiter les agressions ?
A. W. Les risques spécifiques aux médecins sont avant tout liés à la profession et au public accueilli. La bunkerisation du cabinet n’est pas en soi une réponse. L’importance c’est d’être regroupé. C’est la personne isolée qui va faciliter le passage à l’acte. C’est vrai que si on avait tous les cabinets avec un secrétariat médical et un accueil, on limiterait déjà beaucoup les tensions à l’origine de certains débordements. De toute façon, le médecin sera en insécurité au moment où il quittera son cabinet, aussi sécurisé soit-il. La violence s’exprime moins en cabinet qu’à l’extérieur aussi. Une nouvelle fois, la personne est isolée. On ne pourra pas protéger un médecin qui va faire une visite d’une insulte ou d’une violence physique qui sera faite à l’extérieur, car on ne peut pas mettre un policier derrière chaque médecin.
Là où on peut intervenir, c’est en facilitant l’intégration complète du médecin dans la vie des populations. Si on arrive aujourd’hui à rétablir ce lien social entre quartiers et médecins et pas simplement entre patients et médecins, on remet du vouloir vivre ensemble. Mettre un sas ? Mais ce sera toujours le médecin qui ouvrira depuis sa salle de consultation. Il ouvrira au début et au bout de deux mois, il ne regardera même plus son visiophone. L’investissement technologique peut être intéressant dans certains cas mais c’est la réponse humaine qui aura le plus d’efficacité.
« La réponse humaine, toujours plus efficace »
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