Au procès en appel du Mediator, l'Assurance maladie a réclamé jeudi 25 mai, par la voix de son avocat, le remboursement par le groupe Servier de près de 490 millions d'euros, en estimant que le laboratoire pharmaceutique s'était servi d'elle comme d'une « vache à lait ».
« Dossier archi-frauduleux », « supercherie », « subterfuge » : devant la Cour d'appel de Paris, George Holleaux, avocat du régime général de l'assurance maladie, n'a pas eu de mots assez durs pour dénoncer les méthodes employées, selon lui, par Servier pour commercialiser et maintenir le plus longtemps possible le remboursement par la Sécurité sociale du Mediator.
Le deuxième groupe pharmaceutique français et son ex-directeur général sont rejugés depuis janvier pour « tromperie aggravée », « homicides et blessures involontaires », « obtention indue d'autorisation de mise sur le marché » et « escroquerie » au préjudice notamment des caisses de sécurité sociale et des mutuelles.
En première instance, en mars 2021, le groupe avait bénéficié d'une relaxe pour cette dernière infraction. Le tribunal correctionnel avait estimé que Servier n'avait pas fait preuve de « manœuvres frauduleuses » constitutives de l'escroquerie puisque la HAS avait conclu à plusieurs reprises que le Mediator présentait un « service médical rendu » insuffisant, et donc qu'il était connu de tous que son efficacité n'était pas démontrée.
C'est « une erreur manifeste d’appréciation (...) des mécanismes de l’Assurance maladie », a argumenté Géraldine Brasier Porterie, avocate de la Sécurité sociale agricole MSA, rappelant que « le service médical rendu insuffisant n'entraîne aucun remboursement automatique ».
Même si l'Assurance maladie « avait connaissance du comportement frauduleux, elle n'avait pas les moyens d'y mettre fin », a aussi expliqué Me Holleaux, la décision de rembourser ou de ne pas rembourser étant du ressort du ministre de la Santé.
Pour le seul régime général d'assurance maladie, qui couvre 88 % de la population française, l'avocat évalue le préjudice à 486 millions d'euros : 349 millions d'euros pour le remboursement des boîtes de Mediator, 9 millions d'euros pour les échocardiographies prises en charge après 2009 pour dépister les éventuelles séquelles chez les patients et 128 millions d'euros pour les intérêts cumulés.
« Vous vous rendez compte de tout ce qu’on aurait pu faire avec cet argent ? », a tonné Me Holleaux, calculant que cela représentait « six mois de fonctionnement du CHU de Lille ».
(Avec AFP)
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