« Je suis généraliste, installé en libéral à Marignane, dans les Bouches-du-Rhône, et j’exerce une journée par semaine à la prison d’Aix-Luynes. J’y apprécie de collaborer avec des équipes très soudées : malgré l’adversité du milieu pénitentiaire, c’est agréable de venir travailler. Avec les patients, on passe par beaucoup d’émotions : cela va de l’empathie extrême pour le patient indigent, celui qui ne sait pas lire ou ne parle pas français, à la peur face au caïd que l’on sait redoutable et violent. Je ne cache pas qu’il s’agit d’un travail difficile. Il me paraît notamment inadmissible qu’au 21e siècle, on incarcère ou on garde en incarcération des personnes vulnérables, présentant un état de santé, notamment de santé mentale, gravement altéré. J’ai vu en prison des personnes auto-agressives, qui ont des gestes d’automutilation quasi-quotidiens, et restent dans leur environnement toxique alors que leur place pour aller mieux est ailleurs. D’autre part, on est souvent amenés à soigner des maux créés par la prison elle-même : une constipation liée à la promiscuité, une insomnie due au bruit… On a parfois l’impression de faire du symptomatique plutôt que du curatif. Mais cela reste un exercice extrêmement enrichissant, qui nous amène à nous interroger énormément sur notre éthique. »
Dr Simon Laugier, généraliste à Marignane (Bouches-du-Rhône)
Article précédent
« Des situations humaines très difficiles »
Dr Benjamin Silbermann, prison de la Santé (Paris) : « La prison est une cocotte-minute »
« Des situations humaines très difficiles »
« On soigne des maux créés par la prison elle-même »
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique