La rentrée s'annonce tonique pour les praticiens libéraux. Les conclusions du Ségur de la santé se sont traduites en médecine de ville par… une lettre de cadrage politique adressée le 19 août par Olivier Véran au nouveau directeur général de la CNAM Thomas Fatome. Le patron de la Sécu, qui a succédé à Nicolas Revel parti à Matignon, a été immédiatement chargé de préparer un double round de négociations conventionnelles de la mi-septembre jusqu'à fin novembre.
Le premier cycle de discussions est programmé avec les syndicats de médecins. L'objectif est de conclure un nouvel avenant à la convention médicale de 2016. La question de la rémunération des médecins libéraux qui s'engagent comme régulateurs ou effecteurs dans le futur service d'accès aux soins (SAS) pour prendre en charge des soins non programmés sera un des sujets majeurs. Pour Olivier Véran, cette négociation ne devra pas passer par « une évolution généralisée de la rémunération à l'acte directe ». « Je souhaite que soient trouvées des solutions de financement au résultat qui tiennent compte du service effectivement rendu aux usagers dans le cadre du SAS et des organisations mises en place au niveau des territoires », écrit le ministre dans sa lettre de cadrage.
Assouplissements
Autre dossier sur la table : la révision de la réglementation sur les consultations à distance, dont le recours a explosé durant la période de confinement. Plusieurs pistes d'assouplissement de la télémédecine sont citées, par exemple en ce qui concerne la règle relative à l'obligation de consultation présentielle dans les 12 mois précédents ou encore le recours à des praticiens « hors territoire », « lorsque le besoin est légitime ». Le déploiement de la télé expertise à l'ensemble de la population sera aussi au menu. Au-delà, le ministre veut ouvrir « largement » la télésanté à l'ensemble des professionnels conventionnés – qu'il s'agisse des sages-femmes et des chirurgiens-dentistes mais aussi des professions non médicales pour déployer le télésoin chez les infirmiers, kinés ou orthophonistes.
Pour renforcer la continuité des soins au domicile des patients en perte d'autonomie, le ministre encourage une « incitation aux visites gériatriques des médecins libéraux ».
Un autre volet de l'avenant à la convention médicale visera à réduire les délais d'accès aux consultations spécialisées de second recours. La revalorisation des actes de certaines spécialités cliniques est mentionnée noir sur blanc dans le courrier du ministre (« gynécologues médicaux, pédiatres et psychiatres notamment ») pour encourager leur participation aux objectifs prioritaires de santé publique. L'avenant devrait intégrer un volet sur la qualité et la pertinence des soins avec l'intégration de nouvelles spécialités dans la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP).
Multiplier les CPTS
Deuxième priorité : réviser l'accord conventionnel interprofessionnel (ACI) sur les CPTS (communautés professionnelles territoriales de santé) à la faveur d'un round de négos avec les représentants des praticiens mais aussi des infirmiers, pharmaciens ou encore kinés pour développer l'exercice coordonné. L'un des enjeux est le déploiement « accéléré » des CPTS grâce à des modalités d'adhésion et de suivi plus simples et un financement adapté. Au passage, le ministre souhaite que ces collectifs de libéraux héritent d'une mission de préparation et de réponse aux menaces et crises sanitaires graves (avec la possibilité de déclencher un financement en cas d'urgence sanitaire).
Parallèlement, la CNAM devra apporter un appui conventionnel aux équipes de soins primaires et aux équipes de soins spécialisés. Il s'agit de favoriser une coordination souple autour de protocoles à l'échelle locale. Mais pas question d'« aboutir à la mise en place de rémunérations individuelles pour des coopérations qui ne seraient pas structurées à l'échelle d'une patientèle », prévient la lettre de cadrage.
Quels moyens ?
Cette feuille de route ministérielle laisse les syndicats de médecins libéraux sceptiques. Olivier Véran s'est bien gardé dans sa missive d'indiquer l'enveloppe financière allouée à ces négos d'automne 2020. « Le Ségur a abouti à des investissements très importants pour l'hôpital. On ne comprendrait pas que la ville ne bénéficie pas d'un financement satisfaisant pour valoriser l'acte médical et améliorer les conditions d'exercice », souligne le Dr Philippe Vermesch, président du SML. Ce n'est pas un hasard si, ces dernières semaines, les syndicats ont multiplié les doléances tarifaires concernant les consultations, les visites, les spécialités au bas de l'échelle des revenus ou encore les télé-expertises.
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