La loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades a renforcé le dialogue : 54 % des contentieux médicaux se sont réglés à l’amiable en 2009, contre 14 % en 2004.
La justice est moins saisie, au profit des commissions de conciliation et d’indemnisation. La voie pénale reste l’exception (une affaire pour mille médecins en 2009, deux fois moins qu’en 1999). En clair, point de menace d’une judiciarisation à l’américaine. Malgré tout, la peur du procès reste ancrée chez le médecin, pas toujours enclin à communiquer les dossiers en cas de réclamation.
Des décisions parfois très favorables aux patients
Une série de décisions judiciaires rendues depuis la loi Kouchner ont redistribué les responsabilités. « Parfois, nous avons rendu des décisions très favorables aux patients », observe Frédérique Dreiffus-Netter, conseillère à la première chambre civile de la Cour de cassation. Les fabricants s’en sortent moins bien. La magistrate cite en exemple le Distilbène : les femmes exposées in utero n’ont pas à produire d’ordonnance si elles sont atteintes de malformations spécifiques. Cette preuve indirecte (la malformation) leur permet de s’adresser à n’importe lequel des deux laboratoires qui commercialisaient la molécule, afin de se faire indemniser.
Le cas du vaccin contre l’hépatite B est plus délicat, faute de lien scientifiquement établi avec la sclérose en plaques. La Cour de cassation a d’abord conclu à une absence de responsabilité juridique, avant de se raviser en cas de « présomptions graves, précises et concordantes ». Une jurisprudence « imparfaite » selon Frédérique Dreiffus-Netter, car les juges du fond, chargés d’évaluer les « présomptions », peuvent arbitrer diversement d’une région à l’autre.
Perte de chance, devoir d’information : gare à la faute
Quid de la responsabilité des médecins ? La loi Kouchner a mis le corps médical à l’abri de certaines actions. Le professionnel n’est responsable désormais qu’en cas de faute. En cas d’aléa thérapeutique, la solidarité nationale prend le relais. L’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) indemnise ainsi les infections nosocomiales.
Si le matériel est défectueux (prothèse éclatée par exemple), la responsabilité du médecin est abandonnée (arrêt de 2012).
A contrario, le médecin est plus sévèrement jugé en cas de perte de chance. Un médecin a ainsi été condamné pour n’avoir pas hospitalisé à temps une femme décédée d’une grippe maligne. Personne ne sait si la patiente aurait survécu, mais pour la Cour de cassation, il y a eu faute (arrêt de 2010).
Le non-respect du devoir d’information peut coûter cher aux médecins, notamment s’ils prescrivent hors AMM. Des avocats se sont engouffrés dans la brèche et une dérive est apparue. « Nous en étions arrivés à indemniser en l’absence de tout dommage, alors que le médicament est reconnu sans risque ! », note Frédérique Dreiffus-Netter. Les juges ont modifié la jurisprudence en janvier 2014, de telle sorte qu’un médecin ne peut plus être condamné s’il a omis de signaler un risque, et si ce risque ne s’est pas réalisé.
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