Champion de notre classement, haut la main, Olivier Véran totalise 843 points, laissant loin derrière son challenger, Christian Hutin, avec 607 points. « Si vous prenez les trois derniers jours, avec la discussion du PLFSS, nous déclare le rapporteur général de la commission des affaires sociales, j’aurai totalisé 56 heures de présence active à l’Assemblée. J’attaque d’ordinaire mes journées à 7 heures, et je fais nocturne régulièrement jusqu’à 2 heures du matin. Soit des journées de 17 à 20 heures. Du coup, j’ai sacrifié mes trois séances hebdomadaires à la salle de sport et j’ai fortement augmenté mes prises de caféine, pour tenir avec des nuits qui ne dépassent pas cinq heures. » Un rythme circadien somme toute très macronien, pour cet élu de la République en marche, proche du président. « Comme me disait une amie médecin, tu as voulu la bicyclette, maintenant à toi de pédaler ! ajoute le député neurologue, mais j’avais certainement une vie plus dure quand j’étais aide-soignant en EHPAD pour payer mes études ! »
Le numéro 1 du classement ne se lamentera donc pas sur les cadences infernales qui épuiseraient les députés. Après tout, comme l’avait rappelé l’été dernier Jérôme Marty (UFML), « les internes en médecine font 80 heures sans le train et l’avion payé, ni la retraite avantageuse, ni la cantine, ni la piaule confortable » (le Quotidien du 8 juin).
En revanche, paradoxalement, c’est en queue de classement qu’on recueille le plus de plaintes au sujet d’un syndrome de burn-out parlementaire. « Nous sommes admiratifs devant la cadence que s’impose Anne Genetet, 23e de notre palmarès, nous confie son assistante. Députée des Français de l’étranger, elle parcourt régulièrement une circonscription qui s’étend sur 49 pays, allant de Russie en Iran, de Thaïlande au Vietnam, en contact permanent avec les conseillers consulaires, les associations d’amitié internationale et les groupes d’études. Elle s’investit énormément dans les débats bioéthiques comme à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST). Et elle traite des interventions par dizaines entre ses déplacements à travers l’Asie. Aucun de ces engagements n’est pris en considération dans les classements. » Bref, pas si bonnet d’âne que ça !
Sans doute est-ce là que le bât blesse pour les palmarès : ils ne prennent pas en compte le travail accompli par les députés en circonscription. Et ce n’est pas par hasard que Ramlati Ali, qui fait la navette entre Mayotte et Paris se classe toute dernière. « Des allers-retours de 16 000 km à chaque fois, souligne son assistante, qui, elle aussi, salue l’énergie extraordinaire de sa députée, selon elle une bosseuse infatigable (au demeurant injoignable). L’invalidation de son élection l’a de surcroît astreinte à une deuxième campagne au printemps, forcément avec un impact sur sa présence à Paris.
Quant à l’avant-dernier tout en bas aussi du podium, le franco-kosovar natif de Corée Joachim Son-Forget, il représente les Français de l’étranger mais sans le handicap de l’éloignement, puisqu’il est l’élu des expatriés de Suisse et du Lichtenstein. Son faible score (75 points) pourrait s’expliquer par ses nombreuses prestations et tribunes dans les médias et dans son think-tank, autant d’engagements qui échappent aussi aux critères du classement.
Globalement, observateur attentif du haut du perchoir, Bernard Accoyer rejoint les trois quarts des députés médecins qui se disent plus accaparés par leurs travaux parlementaires qu’ils ne l’étaient pas leur exercice médical. « Si on fait le décompte horaire, il n’y a pas de doute, le temps d’un député est plus contraint que celui d’un médecin. Mais c’est un temps programmé et évalué, alors que quand vous êtes médecin, vous êtes sans cesse confronté aux urgences et aux interventions qui débordent de vos prévisions. Les obligations d’un médecin sont plus facteur de stress que l’agenda, même débordant, d’un député. » Nos députés médecins bénéficieraient donc d’une meilleure qualité de vie, quoi qu’ils nous en disent.
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