« J’ai même connu le temps où nous étions plus de 50, se souvient leur doyen, Jean-Pierre Door, qui en est à sa quatrième législature. Nous sommes de moins en moins nombreux, ce sont les énarques et les fonctionnaires qui occupent l’hémicycle. Parmi nous, les médecins qui étaient au contact permanent de leurs territoires ont cédé la place à une nouvelle vague d’élus, les nouveau-nés politiques hors-sol que sont souvent les macronistes ».
Mutation de l'engagement
« Nous vivons une mutation générale de l’engagement, observe, quant à lui sans nostalgie, Marc Delatte. On s’est émancipé du temps où le médecin notable régnait sur son territoire. Aujourd’hui, les médecins s’engagent plus volontiers dans des associations d’entraide. Ceux qui optent pour la politique sont dans une démarche citoyenne de service. En ce sens, on peut parler d’un nouveau monde. »
Pour Delphine Bagarry, « les médecins, même s’ils gardent la confiance de leurs patients-électeurs et leur statut social, n’en souffrent pas moins d’un déficit de notoriété dans les territoires. Sous la IIIe République, tout un chacun les identifiait, ce n’est plus le cas. Les campagnes électorales s’en ressentent forcément. Notoriété moindre, moindre nombre d’élus. »
Christian Hutin pointe un autre critère d’explication; selon lui, il est économique : « Quand vous êtes libéral, vous n’avez ni la ressource financière, ni le temps de vous investir dans le combat politique, alors que pour les hospitaliers, l’engagement est beaucoup plus facile. » « Moins de temps pour faire de la politique, mais aussi une moindre fibre humaniste, ajoute Michel Lauzzana pour expliquer l’érosion médicale du Palais-Bourbon. De plus en plus, les médecins sont accaparés par des démarches techniques et technologiques qui les détournent de la dimension humaniste de notre activité. Or, moins d’humanisme, c’est moins d’altruisme, moins de goût pour travailler pour les autres. Et donc, en toute logique, moins de députés. »
Du haut du perchoir qu’il a occupé durant cinq ans, Bernard Accoyer accuse quant à lui la réforme du cumul des mandats : « L’interdiction du cumul a contraint les élus à faire des choix. Entre la charge de maire, qui s’exerce par nature au contact des électeurs et dans le concret des décisions, et celle de député, qui oblige à s’éloigner du terrain pour débattre et travailler à Paris, les médecins, proches du terrain, ont opté le plus souvent pour la première », constate l’actuel maire-délégué d’Annecy-le-Vieux. Les médecins ne sont pas pour autant en voie d’extinction parlementaire, mais leur perte de terrain est indéniable, au profit de la montée des assistants parlementaires, élevés dans le sérail de l’Assemblée. Je le regrette pour le pays et la qualité de la représentation de la diversité nationale. La profession médicale parle directement aux Français, elle exerce un rôle d’influence sans doute moindre que celle de journaliste, mais les médecins sont des observateurs et des médiateurs privilégiés de la politique. Il y aura de moins en moins de députés médecins. Leur perte de terrain à l’Assemblée est regrettable pour la représentation de la diversité nationale, la vie démocratique et tout le pays. »
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