Les objectifs du contrôle du diabète sont d'éviter les épisodes d'hypoglycémie et de ramener en permanence la glycémie entre 0,70 et 1,80 g/l, l'idéal étant compris entre 0,70 et 1,40 g/l. Dès les années 1970 , des dispositifs de pancréas artificiel au lit du malade qui permettaient de maintenir la glycémie dans cette zone par une perfusion IV continue d'insuline et éventuellement de glucose sur la base d’une mesure continue IV du glucose ont vu le jour. Ces systèmes étaient inutilisables en ambulatoire. Au début du siècle sont apparus des systèmes miniaturisés mesurant le glucose en continu sous la peau, que l’on a pu coupler aux pompes à insuline mais avec l'intervention nécessaire du patient pour adapter le débit de la pompe en fonction des données glycémiques fournies toutes les 5 minutes. Des travaux ont démontré qu’une pompe à insuline implantée utilisant la voie intrapéritonéale, ou portable utilisant la voie sous-cutanée, pouvait être guidée par une mesure continue du glucose au moyen de capteurs intraveineux ou sous-cutanés grâce à des algorithmes de contrôle. Enfin, ces dernières années ont montré des avancées considérables vers une administration d’insuline en boucle fermée ambulatoire au moyen de systèmes miniaturisés portables comprenant une pompe à insuline, un capteur de la glycémie et une station de contrôle hébergeant les algorithmes représentée par une tablette ou un smartphone. L’élément clé du système est l’algorithme de contrôle qui calcule la quantité nécessaire d’insuline à perfuser chez le patient diabétique de type 1 pour maintenir la glycémie proche de la norme. Les difficultés avec la voie sous cutanée viennent du délai de mesure par le capteur et du délai d'action de l'insuline perfusée par cette voie. Il faut donc que les algorithmes travaillent en prospectif.
Les débuts en ambulatoire
La large collaboration européenne et transatlantique a fait exploser la recherche. Une équipe anglaise a été la première à montrer que le temps passé en hypoglycémie la nuit chez les enfants pouvait être divisé par 3 lorsqu' un ordinateur réglait la perfusion de la pompe. Le temps de la normoglycémie était, quant à lui, doublé. Mêmes constatations dans les données de travaux italiens, américains et français (Montpellier) chez l’adulte. Mais de tels systèmes n’étaient pas compatibles avec une utilisation automatisée et ambulatoire. Les Israéliens ont été les premiers a démontré que le système pouvait être utilisé la nuit en dehors de l'hôpital dans un camp de vacances mais toujours à l'aide d'un ordinateur portable.
Le remplacement de l'ordinateur a alors été envisagé par le transfert de la gestion de l’algorithme sur un smartphone, ou une tablette, connecté sans fil ou avec le moins de fils possible à la mesure continue du glucose et à la pompe à insuline. En octobre 2011, un patient adulte à Montpellier et un autre à Padoue ont pu ainsi utiliser pour la première fois un pancréas artificiel en ambulatoire en dormant la nuit à l'hôtel et en se promenant en ville durant la matinée (1). Le dispositif comprenaitune pompe à insuline portable, un appareil de mesure continue du glucose sous la peau et un module informatique de contrôle installé dans un téléphone portable. Les hypoglycémies nocturnes étaient réduites et le temps passé avec une glycémie dans la norme était augmenté. Cette étude pilote a ensuite été confortée par des études réalisées chez plusieurs patients aux Etats-Unis, en Italie et en France. Tout récemment, l'équipe anglaise de Cambridge associée à des équipes d’Allemagne et d’Autriche, en utilisant une tablette à la place du smartphone chez les enfants la nuit et chez les adultes 24 heures sur 24 pendant 3 mois, a démontré une amélioration de l'HbA1c et du temps passé dans la norme glycémique ainsi que la réduction des hypoglycémies (2). Dans le même temps, un travail franco-italo-néerlandais était réalisé chez des adultes à domicile le soir (diner inclus) et la nuit pendant 2 mois. Les résultats obtenus sont similaires (3).
Une nouvelle étude va commencer en 2016 dans 10 centres (aux Etats-Unis, à Amsterdam, à Padoue et à Montpellier). Pendant 6 mois, le système sera automatisé en boucle fermée 24 heures sur 24 sauf au moment des repas qui devront être annoncés par les patients (de 14 à 75 ans). Cette étude va valider l'utilisation durable du pancréas artificiel en ambulatoire et son éventuelle commercialisation.
D'après la communication du Pr Eric Renard, coordinateur du département endocrinologie-diabétologie-nutrition, CHRU de Montpellier
(1) Cobelli C, Renard E, Kovatchev BP, et coll. Pilot studies of wearable outpatient artificial pancreas in type 1 diabetes. Diabetes Care 2012;35: e65-7
(2) Thabit H, Tauschmann M, Allen JM, et coll. Home use of an artificial beta cell in type 1 diabetes. N Engl J Med 2015;373:2129-40
(3) Kropff J, Del Favero S, Place J, et coll. 2 month evening and night closed-loop glucose control in patients with type 1 diabetes under free-living conditions: a randomised crossover trial. Lancet Diabetes Endocrinol 2015;3:939-47
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