Forum des rumeurs
L’appétit vient en mangeant, dit la sagesse populaire ; au lit comme à table, une même dynamique s’enclencherait, qui repousserait sans cesse les limites de la satiété. Dans les magazines féminins, le courrier du cœur le confirme, en particulier pour les jeunes, chez lesquels la période réfractaire est très courte, l’envie de faire l’amour se renouvelle au rythme d’une libido explosive, frénétique. Bref, le sexe entraîne le sexe, l’amour veut plus d’amour. Plus on le fait, plus on le fait.
Et la mythologie gréco-romaine n’incarne-t-elle pas déjà le phénomène d’emballement continuel de la sexualité, avec ces satyres au priapisme sans trêve ni relâche, qui donnèrent leur nom au satyriasis, et ses nymphes insatiables, qui « inventèrent » la nymphomanie ? Psychiquement et organiquement, le désir de faire l’amour se nourrirait donc de l’acte d’amour lui-même. L’ocytocine, les endorphines, la dopamine, les amphétamines et autres substances délivrées durant l’activité sexuelle stimulent les centres du plaisir et se font redemander par eux, toujours plus qu’hier et bien moins que demain, comme disait le poète.
Zapping épidémiologique
La fréquence des relations sexuelles fait l’objet d’enquêtes régulières : Francoscopie, études Durex, « contexte de la sexualité en France », BVA/Psychologies prennent presque chaque année le pouls sexuel du pays, avec des données déclaratives dont les spécialistes s’accordent à considérer qu’elles surestiment quelque peu la réalité hebdomadaire, mensuelle ou annuelle du sexe tricolore : 150 relations par an, 8,7 par mois, 2,67 par semaine, à quelques décimales près.
En revanche, les variations de rythme ne sont pas documentées. A contrario, les études par tranche d’âge reflètent le déclin de l’activité sexuel avec l’âge : 9 rapports mensuels à 25 ans, 7 à 50 ans, 5 à 60 ans et 4 après 65 ans. Somme toute, montrent les enquêtes, avec le temps, moins on le fait, moins on le fait.
Zoom de l’expert
« Cette formule n’est pas fausse, mais elle ne saurait être généralisée à tous, estime le Dr William Lowenstein, addictologue. Vous avez des boulimiques qui, après avoir couru les jeux Olympiques du cul avec un partenaire, vont se sentir rassasiés et retrouver un rythme moins accéléré, selon les moyennes de fréquence que l’on connaît. D’autres, faute de récompense suffisante, vont se livrer à une activité sexuelle de plus en plus intense et frénétique, jusqu’à tomber dans l’addiction comportementale et l’hypersexualité ; certains ou certaines vont s’attacher à un partenaire comme à une drogue, avec un besoin insatiable de shoot sexuel, d’autres iront vers des partenaires multiples en recourant aux réseaux et aux technologies du porno, comme les webcams. »
« Ce n’est pas un motif de consultation en addictologie, mais depuis quelques années, j’ai constaté que les patients qui consomment de la cocaïne, pour un quart d’entre eux sont sujets à l’hypersexualité, une proportion qui atteint le tiers des usagers de drogues de synthèse. Dans la check-list de l’interrogatoire, c’est donc aujourd’hui une question qui doit être systématiquement évoquée, à l’encontre du puritanisme qui caractérise trop souvent les cabinets médicaux de notre beau pays gaulois. Elle touche une majorité écrasante d’hommes, même si de plus en plus de femmes sont concernées. Et souvent la dépendance sexuelle va compliquer la prise en charge des dépendances de substance : sans celles-ci, les personnes craignent de ne plus pouvoir délirer sexuellement, de le faire moins et moins intensément. C’est une sorte de dialectique : plus on le fait et plus on en prend, plus on en prend et plus on le fait ! »
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