Les AVC détectés plus tôt en Franche-Comté

La télémédecine égalise les chances des urgences neurologiques

Publié le 17/11/2011
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PREMIÈRE CAUSE de handicap, deuxième cause de démence et troisième cause de mortalité, les accidents vasculaires cérébraux représentent une urgence neurologique, pour laquelle la rapidité de la prise en charge initiale et de la rééducation sont des déterminants majeurs du pronostic. La Franche-Comté est largement concernée par cette pathologie, puisqu’on estime à environ 4 500 le nombre d’AVC chaque année. La région fut ainsi l’une des pionnières dans la mise en place d’une unité neurovasculaire dès 1987. En 1999, sous l’impulsion des neurologues de la région, a été créé le réseau des urgences neurologiques de Franche-Comté (RUN-FC), dont le but était de constituer une structure de proximité régionale, afin de répondre au mieux aux besoins de prise en charge des urgences neurologiques, accidents vasculaires cérébraux (AVC) mais aussi traumatismes crâniens, épilepsies, céphalées…

Le réseau a développé des outils de télémédecine permettant aux neurologues, neurochirurgiens et radiologues du centre hospitalier de Besançon de pouvoir réaliser des diagnostics à distance et ainsi de co-prendre en charge, avec les urgentistes des hôpitaux de Franche-Comté, les urgences neurologiques.

Vidéoconsultation aux urgences.

Depuis 2008, tous les services d’urgences de la région disposent d’une salle équipée pour la vidéo-consultation. Des collaborations technologiques permettent d’améliorer le diagnostic des AVC et autres urgences neurologiques et de réaliser si besoin une thrombolyse à distance. Le neurologue senior d’astreinte répond aux appels dans son hôpital central, et peut entrer en contact avec l’urgentiste et son patient en moins d’une minute via un site internet dédié. Des caméras haute définition sont manipulées depuis le centre hospitalier, « ce qui permet au neurologue de voir le patient et d’interagir avec lui, élément essentiel dans la démarche diagnostique », souligne le Pr Thierry Moulin, de consulter l’imagerie et de dialoguer avec le médecin de garde sur place afin de décider de la meilleure prise en charge thérapeutique. « La prise de décision, et de ce fait la responsabilité, sont partagées, le patient et sa famille également informés. Comme le stipule l’AMM, l’acte de thrombolyse doit être indiqué par le neurologue, mais il peut être réalisé par l’urgentiste sur place. En 2010, 70 patients présentant un AVC ont ainsi pu bénéficier d’une thrombolyse télé-assistée. Et depuis 2002, quelque 15 000 patients ont été pris en charge par télémédecine, ce qui a permis de réduire les transferts au Chru. »

« Dans un premier temps, la télémédecine a permis d’optimiser les ressources en regroupant toutes les forces sur le territoire. Mais ce modèle est non seulement substitutif, mais il permet également de progresser en qualité. Le Centre hospitalier de Pontarlier, qui peut être cité comme exemple, a ainsi vu son activité augmenter, avec un doublement du taux de détection des AVC. Ce qui constitue aussi une avancée en termes d’égalité des soins », se félicite le Pr Moulin.

Aujourd’hui, la télémédecine en neurologie connaît un véritable essor, car elle a permis de structurer la filière de prise en charge des AVC plus vite que ne l’ont fait les urgences neurologiques. Ce type d’organisation implique que toutes les procédures soient bien formalisées, que chaque intervenant, du neurologue au brancardier, connaisse bien son rôle ; le décret sur la télémédecine est à cet égard très positif car il met bien en avant la notion d’organisation.

« Les atouts de la télémédecine ne se limitent pas aux urgences. Elle autorise le suivi des patients, y compris parkinsoniens et peut aussi être envisagée pour réaliser des tests neuro-psychologiques à distance, avec une infirmière sur site supervisée par un neuro-psychologue à distance. Ce qui présente le double avantage de faciliter l’accès à ces tests à un plus grand nombre de patients et de former les infirmières sur sites, avec à terme un possible passage de compétences », conclut le Pr Moulin.

D’après un entretien avec le Pr Thierry Moulin, coordinateur du Réseau des urgences neurologiques de Franche-Comté (RUN-FC)

Dr ISABELLE HOPPENOT

Source : Le Quotidien du Médecin: 9043