Le système de santé français connaît une transformation sans précédent qui bouscule les acteurs de la santé, du social et du médico-social, d'un point de vue structurel et organisationnel, et recompose l’offre de soins dans le cadre des nouveaux territoires de santé. Si les facteurs de risques sont multiples, trois grandes évolutions doivent être prises en compte.
Des changements réglementaires à prendre en compte
Avec l’affirmation d’une approche populationnelle de l’offre de soins, le risque se déplace autour de la notion de prise en charge du patient au niveau du territoire. Désormais, au-delà d’un acte ou d’un établissement isolé, il convient d’appréhender le risque et la chaîne des responsabilités à l’échelle d’un territoire – régional, national voire international — sur lequel collaborent différents acteurs : médecins, groupements hospitaliers, cliniques, structures du domicile… Les formes d’exercices évoluent également avec davantage de collaboration et de coordination entre les médecins libéraux exerçant collectivement ou encore la profession nouvellement créée d’assistants médicaux.
Les évolutions technologiques changent la donne
La digitalisation et les nouvelles technologies offrent des opportunités sans précédent. C’est d’ailleurs la réalité de l’offre de soins aujourd’hui (télémédecine, téléconsultation). L’adaptation n’est pas seulement liée à la technologie mais à l’arrivée de nouveaux acteurs comme Google qui a récemment annoncé la mise au point d'un algorithme d'intelligence artificielle capable de donner les probabilités de décès, de sortie ou de réadmission d'un patient à l'hôpital. On le voit, le diagnostic ne sera plus forcément fait par un médecin généraliste mais par un relevé en continu d’indicateurs via des objets connectés et une analyse par des plateformes spécialisées, en France ou ailleurs, avec des risques associés à cette nouvelle façon d’analyser. La radiologie par exemple se transforme rapidement avec l’utilisation de l’intelligence artificielle et du big data pour une meilleure détection de nouvelles pathologies. Le développement de la e-santé vient par ailleurs modifier la donne avec l’utilisation de données de santé dont la protection appelle l’application d’une réglementation rénovée au niveau européen et national.
Les mutations sociétales à intégrer
De plus en plus acteurs de leur propre parcours de soins, les patients sont aussi mieux informés et plus sensibles à la notion de risques. Ils refusent régulièrement l’aléa, exigent les meilleurs soins, partagent leur vécu sur les réseaux sociaux et n’hésitent pas à rechercher la responsabilité des établissements et des professionnels de santé. Ainsi, en 2017, près de 15 800 réclamations pour préjudices corporels et matériels ont été enregistrées au sein des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux assurés par Sham, avec, en tête, les accidents de causes médicales (chirurgie, médecine, urgences/SAMU et obstétrique). Développer la relation patient-soignant devient clé pour favoriser une expérience de soin optimale.
Le recours aux nouveaux modes de prises en charge interroge naturellement sur les responsabilités des différents acteurs impliqués dans la prise en charge du patient. Peut-on encore parler d’obligation de moyens ou d’obligations de résultat si c’est un ordinateur qui réalise le diagnostic ? Quel est le niveau de responsabilité des établissements et des professionnels de santé en cas de vol des données de santé à grande échelle ? Qui est responsable en cas d’erreur d’interprétation d’un diagnostic : le médecin ou le fabricant du logiciel ? Ne va-t-on pas vers davantage de risques sériels en cas de dysfonctionnement d’un robot ou d’une application ?
Dans ce contexte, le management des risques médicaux fait partie des enjeux fondamentaux des établissements. L’évaluation, la prévention et le pilotage des risques constituent plus que jamais une réponse particulièrement adaptée pour optimiser la sécurité des prises en charge au cours d’un parcours de soins plus complexe.
Il offre aux établissements de santé une formidable opportunité d’amélioration de leur politique de sécurité et de qualité des soins, d’harmonisation de leurs pratiques. Bien appliqué et accompagné, c’est la confiance des patients envers leurs établissements et le système de santé qui se verra renforcée.
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