« Il faudrait vraiment qu’on arrive à ouvrir en France un grand débat sur le juste prix des médicaments du cancer. Car c’est un sujet qui concerne toute la société et pas seulement les laboratoires et les autorités chargées de la régulation du médicament. Et ce débat est essentiel car le prix de certains traitements du cancer risque de mettre en péril notre système de financement solidaire de la santé », explique Christian Saout, secrétaire général délégué du Collectif inter-associatif sur la santé (CISS), structure qui regroupe 42 associations.
Le CISS a suivi de près les négociations autour du prix du sofosbuvir, cette molécule de l’hépatite C. « Il s’agit d’un traitement efficace qui pourrait nous permettre d’arrêter l’épidémie s’il pouvait être délivré à tous les patients qui en besoin. Mais en raison du prix invraisemblable réclamé par le fabricant, il a été décidé de réserver ce médicament uniquement aux patients ayant des fibroses les plus graves. Cela revient à opérer une sélection des patients au nom de critères médico-économiques. Est-ce le même modèle que nous voulons voir se mettre en place, demain, pour les malades du cancer ? Si tel est le cas, alors, il faut le dire franchement », indique Christian Saout.
Selon ce responsable associatif, ce débat sur le prix des médicaments se pose aujourd’hui de manière très directe dans le domaine du cancer. « Les États-Unis viennent d’admettre une immunothérapie qui coûte près de 170 000 dollars par an. Ce niveau de prix pose le problème du risque de non soutenabilité de la dépense médicamenteuse dans des pays tels que le nôtre. La France revendique une approche humaniste dans la délivrance des traitements innovants qui va à l’encontre de l’approche "utilitariste" mise en avant en Grande-Bretagne. Mais notre système de financement solidaire de la santé n’est pas dimensionné pour faire face à de tels niveaux de prix. Et il est donc indispensable que nous débattions de mesures à mettre en œuvre pour maintenir un accès le plus large possible à l’innovation pour les patients », souligne Christian Saout.
Selon lui, une première solution serait d’instaurer une sorte de « paiement à la performance ou au succès thérapeutique » pour ces molécules très onéreuses. « L’idée est toute simple : si le médicament ne marche pas, le laboratoire serait tenu de rembourser. Je sais que certaines firmes ne sont pas hostiles à cette approche, souligne Christian Saout, qui plaide aussi pour des solutions encore plus directes. On pourrait très bien imaginer que, pour certains traitements au coût tout à fait prohibitif, la France puisse avoir recours au système des prix administrés. C’est une option qui n’est jamais utilisée mais qui figure pourtant dans le code de la santé publique. On pourrait aussi utiliser le dispositif des licences obligatoires qui sont prévues dans les accords internationaux. En tout cas, il est clair qu’il nous faut avoir ce débat sur toute la palette possible d’outils de régulation des prix si on ne veut pas mettre en danger notre système d’Assurance-maladie solidaire », indique Christian Saout.
Article précédent
Les entreprises du médicament plaident pour la nouveauté
Article suivant
Le bel exemple marocain
L’exemple de la sénologie à l’Institut Curie
Les entreprises du médicament plaident pour la nouveauté
L’inquiétude des associations de patients
Le bel exemple marocain
Petit à petit, ça s’améliore
Un clinicien pour l’innovation
Favoriser le projet de vie des patients
Les pharmaciens, maillon indispensable
Amplifier l’investissement du généraliste
Favoriser un accès plus équitable aux traitements
La HAS envisage un remboursement innovant
L’INCA prône une réflexion collective
Le patient acteur de l’évolution
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024