Prise en charge cancérologique

Une intervention nutritionnelle à la carte

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Publié le 30/01/2020
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Corriger la dénutrition le plus possible permet de donner à l’hôte toutes les chances de lutter contre le cancer. Encore faut-il instaurer un dialogue entre nutritionniste et équipe oncologique.
L’hôte a un rôle clé dans la lutte contre son cancer

L’hôte a un rôle clé dans la lutte contre son cancer
Crédit photo : Phanie

Le Dr François Goldwasser (hôpital Cochin, Paris) s’intéresse depuis de longues années à la relation entre antitumoraux et prise en charge nutritionnelle. « Les avancées récentes de la biologie appliquée aux cancers nous obligent à revoir notre regard clinique sur la maladie et ses différents traitements, explique-t-il. En effet, alors que nous menons actuellement des essais sur les immunothérapies, qui n’agissent pas directement sur les cellules cancéreuses, le rôle clé de l’hôte conduit à repenser l’équilibre entre action sur la cellule cancéreuse et sur son environnement ». Conséquence clinique, il faut prévenir la dénutrition et la corriger le plus précocement possible. « Pour le syndrome tumoral, on sait à quel point la précocité d’un principe actif est importante… C’est pareil pour l’intervention nutritionnelle : plus c’est tôt, mieux c’est », souligne-t-il.

Comme l’indique la Société francophone de nutrition clinique et métabolisme (SFNEP), l’objectif de la nutrition thérapeutique est de maintenir l’état nutritionnel, à but préventif et curatif de la dénutrition, pour éviter l’apparition de complications en rapport avec l’état carentiel et diminuer les comorbidités des traitements oncologiques. En situation curative, la nutrition thérapeutique a pour but de favoriser la faisabilité complète des protocoles thérapeutiques et donc de réduire l’incidence des complications des traitements tout en limitant les complications propres du support nutritionnel. En situation palliative, elle a pour objectif principal le maintien ou l’amélioration de la qualité de vie.

Cependant, il n’est pas toujours aisé de savoir quand débuter et/ou arrêter cette prise en charge nutritionnelle spécifique, d’autant plus que cela dépend de chaque patient, de l’avancée de la maladie, de la façon dont est supporté le traitement, du potentiel déficit en énergie, etc.

Une approche pluridisciplinaire à mettre en place

Le Dr Goldwasser reconnaît que la prise en charge nutritionnelle n’est pas toujours facile à mettre en place, puisque plusieurs disciplines doivent pour cela dialoguer davantage, quitte à bousculer certaines habitudes. Faire participer les nutritionnistes et les diététiciens aux réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) pourrait être une première piste d’action pour avancer en ce sens. « État de la tumeur, nutritionnel, crise énergétique, état dépressif… Faire face au défi de la complexité suppose de s’intéresser à ces différents axes », ajoute-t-il, avant d’apporter des précisions sur la durée et l’arrêt des traitements. Ainsi, il convient notamment de mettre un terme à l’intervention nutritionnelle entérale ou parentérale si elle est inefficace (cachexie réfractaire, composante inflammatoire, métabolique) ou mal tolérée, mais aussi si l’on constate le rétablissement d’apports oraux suffisants.

Enfin, il ne faut pas négliger l’importance du muscle en activité et donc la mise en place de programmes de réhabilitation musculaire à toutes les étapes de la maladie. « La prise en charge précoce de la dénutrition et de la sarcopénie, reposant sur la nutrition associée à la pratique d’activité physique adaptée (APA), est un enjeu majeur en oncologie », explique la Dr Cindy Neuzillet (Boulogne-Billancourt). L’APA permet en effet d’améliorer la condition physique et la qualité de vie des patients, mais aussi de diminuer les effets secondaires de la chimiothérapie. L’APA est donc un élément clé des soins de support car elle permet d’administrer les traitements dans les meilleures conditions possible et, ainsi, d’améliorer potentiellement la survie des patients.

Sessions « nutrition et traitement anticancéreux : quand débuter et quand arrêter » et « Activité physique et nutrition »

Anne-Lucie Acar

Source : Le Quotidien du médecin