Les 5 dernières années ont été particulièrement riches d’enseignements avec les résultats des grandes études de sécurité cardiovasculaire menées avec les nouveaux antidiabétiques, les essais avec les antiplaquettaires et les anticoagulants directs. Des données qui sont à la base des nouvelles recommandations.
Une première évolution porte sur la classification du risque cardiovasculaire (RCV) des patients, qui guide les interventions thérapeutiques. Sont désormais considérés comme à très haut risque les diabétiques avec une maladie cardiovasculaire établie ou une atteinte d’un organe cible (protéinurie, atteinte réale avec DFG < 30 ml/mn/1,73 m2), ou au moins 3 facteurs de risque majeurs (âge, hypertension, dyslipidémie, tabagisme, obésité) ou ceux ayant un diabète de type 1 (DT1) d’apparition précoce évoluant depuis plus de 20 ans. Les sujets sont à haut risque si le diabète évolue depuis au moins 10 ans, sans atteinte d’un organe cible et en présence d’au moins un autre facteur de risque cardiovasculaire. Enfin, le risque est modéré chez les patients jeunes (moins de 25 ans pour le DT1 et moins 50 ans pour le diabète de type 2 [DT2]) dont le diabète évolue depuis moins de 10 ans et ne présentant aucun autre facteur de risque.
Des évolutions liées à l'efficacité des antidiabétiques
L’une des autres grandes évolutions concerne la prise en charge de l’hyperglycémie du DT2, qui a nettement évolué depuis la démonstration de l’efficacité et de la sécurité des antidiabétiques de la famille des inhibiteurs de SGLT2 et des analogues du récepteur du GLP-1. « Les nouvelles recommandations sont largement basées sur ces résultats », a souligné le Pr Francesco Cosentino. L’empagliflozine, la canagliflozine ou la dapagliflozine sont recommandées pour réduire le risque d’événements cardiovasculaires (classe I/A), chez les DT2 ayant une maladie cardiovasculaire (MCV) ou étant à haut et très haut risque. L’empagliflozine est recommandée chez les DT2 ayant une atteinte cardiovasculaire pour réduire le risque de décès (classe I/B). Il en est de même pour la famille des agonistes du GLP-1 R : le liraglutide, le sémaglutide ou le dulaglutide sont recommandés chez les DT2 avec MCV ou à haut et très haut risque pour réduire le risque d’événement cardiovasculaire (classe I/A) et le liraglutide est recommandé chez ces mêmes patients pour réduire le risque de décès (classe I/B).
Un vrai changement de paradigme s’opère donc dans les deux algorithmes de traitement proposés dans ces recommandations. Chez les DT2 naïfs de toute thérapie médicamenteuse ayant une MCV établie ou à haut et très haut risque, ils préconisent un inhibiteur du SGLT2 ou un agoniste du GLP-1R en première intention en monothérapie, la metformine étant ajoutée en deuxième intention si la cible d’HbA1c n’est pas atteinte. Chez les patients naïfs de tout traitement sans MCV et à risque modéré, le traitement de première intention se base toujours sur la metformine, celui de deuxième intention (si la cible d’HBA1C n’est pas atteinte) peut faire appel aux inhibiteurs de DPP-4, aux agonistes du GLP-1R, aux inhibiteurs du SGLT2 (si la fonction rénale le permet) ou aux thiazolines-diones.
Chez les diabétiques de type 2 déjà traités par metformine, un inhibiteur du SGLT2 ou un agoniste du GLP-1R est ajouté chez les sujets ayant une MCV et ceux à haut et très haut risque. Chez les autres, la metformine est poursuivie en première intention ; le traitement de deuxième intention est le même que chez les patients naïfs de traitement.
Et l'aspirine ?
Les recommandations en matière d’antiagrégation plaquettaire ont elles aussi évolué. Chez les patients à haut risque ou très haut risque, une prévention primaire par aspirine à la posologie de 75 à 100 mg/jour peut être envisagée en l’absence de contre-indications (recommandation de classe IIB/A). Une protection gastrique par les inhibiteurs de la pompe à protons peut être proposée. L’aspirine reste non recommandée en prévention primaire chez les diabétiques à risque modéré.
D’autres évolutions portent notamment sur la gestion du traitement antiplaquettaire après un accident coronaire aigu et sur l’anticoagulation en cas de maladie artérielle périphérique, avec dans cette dernière situation une place pour le rivaroxaban à faible dose (2,5 mg x 2) en association à l’aspirine (100 mg/j) chez les patients symptomatiques à faible risque hémorragique (IIaB).
D’après la présentation des Prs Francesco Cosentino, Suède, et Peter Grant, Royaume-Uni
(1) 2019 ESC Guidelines on diabetes, pre-diabetes and cardiovascular diseases developed in collaboration with the EASD. European Heart Journal. 2019. doi:10.1093/eurheartj/ehz486.
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