La dissection sous-muqueuse consiste en la résection en bloc des lésions tumorales superficielles du tube digestif. Elle évite un geste chirurgical, parfois mutilant, tout en respectant les conditions d’une exérèse carcinologique : marges de tissu sain et analyse histologique de qualité. Son efficacité équivaut donc à celle de la chirurgie, mais avec une procédure mini-invasive conservant l’organe.
Ses indications sont potentiellement assez vastes, puisqu’elle peut être réalisée dans les tumeurs ne dépassant pas la muqueuse ou n’envahissant la sous-muqueuse que de façon superficielle, avec des seuils définis organe par organe et associés à un risque d’atteinte ganglionnaire négligeable. « Dans ce contexte de maladie locale, le meilleur traitement est celui qui permet de conserver l’organe », rappelle le Dr Mathieu Pioche (Lyon).
En pratique, il revient à l’endoscopiste d’évaluer le caractère superficiel ou non de la tumeur sur les différents critères (aspect des reliefs muqueux et vasculaire, forme de la lésion…) et de ne faire une résection par dissection sous-muqueuse que si la lésion est considérée comme superficielle. Si tel est le cas, la résection endoscopique guérit le malade. Dans le cas contraire, un curage ganglionnaire chirurgical sera réalisé dans un second temps uniquement si les résultats anatomopathologiques montrent un facteur de risque d’envahissement ganglionnaire.
Une absence de remboursement
Peu développée il y a encore 2 ans, la technique est en plein essor, et de plus en plus de centres la proposent. Désormais, elle est accessible à peu près partout sur le territoire national, mais, malgré des avancées récentes quant à la durée du geste (divisée par quatre grâce aux progrès techniques et à l’expérience des endoscopistes), il y a encore certains freins à sa diffusion. « On peut regretter que des patients qui devraient bénéficier de cette technique soient en pratique pris en charge chirurgicalement, au prix d’une morbidité élevée et d’une mortalité non nulle », souligne le Dr Pioche.
L’un de ces freins est l’absence de remboursement, qui limite le recours à cette procédure, en particulier dans les centres privés. Le dossier cotation vient cependant d’être ouvert au ministère de la Santé, et les choses pourraient évoluer. Comparativement à la mucosectomie, la dissection sous-muqueuse génère un surcoût initial, mais ne nécessite pas de contrôle endoscopique à 3 mois lorsque la résection est complète initialement.
Une formation chronophage
Autre frein, la nécessité d’une formation spécifique. « Il s’agit d’une technique complètement différente des autres, qui implique une formation chronophage faisant repasser par la case départ, indique le Dr Mathieu Pioche. Il n’est donc pas facile pour les endoscopistes en exercice de se dégager du temps pour se former sur les modèles animaux. » Il est également nécessaire de faire un nombre minimal de procédures, de 50 à 100 par an, pour être performant.
Il est aussi difficile pour des gastroentérologues de référer, au risque de perdre de leur crédibilité, leur patient à un confrère lui aussi gastroentérologue – certains préfèrent donc le référer au chirurgien. « L’une des solutions serait de définir un statut d’endoscopiste interventionnel, auquel les gastroentérologues pourraient référer leurs patients pour la réalisation de ces gestes spécifiques, nécessitant un matériel et un environnement technique particulier », poursuit le Dr Pioche, qui estime que les progrès de la technologie, notamment l’arrivée des endoscopes robotisés à deux bras (déjà en fonction en Chine), devraient simplifier le geste et faciliter sa diffusion.
D’après un entretien avec le Dr Mathieu Pioche, CHU, Lyon
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