Comment préparer au mieux la société à faire face au défi du vieillissement ? « Dans ce domaine, des progrès réels ont lieu avec la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement adoptée par le Parlement le 14 décembre 2015. Cette loi valorise l’autonomie aux dépens de la dépendance et comprend plusieurs mesures importantes pour lutter contre l’isolement, soutenir les aidants et combattre les discriminations liées à l’âge. Mais il reste beaucoup à faire », indique le Dr Jean-Pierre Aquino, délégué général de la Société française de gériatrie et gérontologie (SFGG).
Lutter contre l'isolement
Le premier défi est celui de la lutte contre l’isolement des personnes âgées. « Selon différentes enquêtes, un Français sur dix se sent exclu, abandonné ou inutile. Et dans ce domaine, les plus impactés sont toujours les plus de 75 ans. Selon la Fondation de France, aujourd’hui, 27 % des personnes âgées vivent seules contre 16 % en 2010 », indique le Dr Aquino en saluant la mise en place du programme Monalisa en 2013 par la ministre Michèle Delaunay pour lutter contre l’isolement des sujets âgés. « Une autre priorité est de tisser des liens intergénérationnels. La question des aidants est, elle aussi, cruciale. Aujourd’hui, on estime que 11 millions de personnes en France viennent en aide à une personne en situation de dépendance ou de handicap. Près de la moitié (46 %) de ces aidants a moins de 50 ans et beaucoup sont en activité professionnelle. C’est une réalité qu’il faut prendre en compte. C’est ce qu’a fait l’association France Alzheimer en publiant un Livre blanc en forme de plaidoyer pour les aidants en activité professionnelle. Très récemment a aussi été organisée la deuxième édition des prix « Entreprises-salariés aidants » qui visent à promouvoir des initiatives innovantes », indique le Dr Aquino, en ajoutant que l’efficacité des programmes éducatifs pour les aidants est maintenant reconnue. « C’est également le cas du soutien psychologique précoce aux aidants qui sont en situation de déstabilisation », précise le délégué général de la SFGG.
S'opposer aux discriminations et respecter les droits fondamentaux
Autre priorité : la lutte contre les discriminations liées à l’âge. « Celles-ci sont présentes au quotidien et peuvent remettre en cause l’accès des personnes âgées à leurs droits dans différents domaines, en particulier le logement, la santé ou les assurances. L’accès au logement, par exemple, est très problématique. Les personnes âgées font face à l’insuffisance de logements adaptés et à des pratiques discriminatoires de la part de certains bailleurs », souligne le Dr Aquino.
Dans le domaine des droits, un autre enjeu est celui du recueil du consentement à l’entrée à l’institution. « Dans un rapport, le contrôleur des lieux de privation de liberté avait souligné que les conditions de placement dans les Ehpad pouvaient porter atteinte aux droits fondamentaux des personnes. C’est la raison pour laquelle la loi d’adaptation de la société au vieillissement incite très vivement à recueillir le consentement ou l’assentiment des personnes », souligne le Dr Aquino, en évoquant d’autres avancées de cette loi. « Elle a permis la mise en place dans chaque département d’un conseil de la citoyenneté et de l’autonomie. Elle a aussi permis de donner une nouvelle impulsion à la silver économie », indique-t-il.
Rassembler pour progresser
Le Dr Aquino a pris connaissance avec intérêt du rapport de l’Igas, rendu public en octobre dernier et visant à faire une évaluation à deux ans de la loi. « Un des enseignements est que cette loi comporte des mesures complexes, dont la mise en œuvre demande du temps. Dans certains cas, ces mesures se heurtent à l’hétérogénéité des départements. Résultat, tous les crédits n’ont pas été utilisés en totalité en 2016, indique le délégué général de la SFFG qui retient deux propositions de l’Igas. La première est de bien informer les retraités actifs sur la nécessité d’anticiper les éventuelles pertes d’autonomie. La deuxième proposition est de faire converger les différents dispositifs d’évaluation des besoins sanitaires et sociaux ».
« Pour relever les défis du vieillissement, mais aussi celui de l’émergence des maladies chroniques, il est nécessaire que les différentes disciplines contributives travaillent ensemble : la gériatrie, la sociologie, la psychologie, l’économie, l’urbanisme, l’éthique… C’est de cette dynamique et de la transversalité de sa démarche, que dépendront les progrès de demain : la gériatrie et la gérontologie associées étroitement… », conclut le Dr Aquino
D’après un entretien avec le Dr Jean-Pierre Aquino, délégué général de la Société française de gériatrie et gérontologie (SFGG)
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