« Depuis une dizaine d'années, il n'est plus rare de voir des nonagénaires et des centenaires survivrent malgré des polymorbidités de stade sévère. Or ces polymorbidités les rendent particulièrement vulnérables aux stresseurs externes, notamment à la grippe », souligne le Pr Gaétan Gavazzi (CH Grenoble). Chez le sujet âgé, la grippe représente un facteur important de décompensation de pathologies respiratoires, cardiovasculaires (infarctus du myocarde, AVC…) mais entraîne aussi, d'autres complications telles que la dépendance fonctionnelle, la chute, la malnutrition, les surinfections, les décompensations d'insuffisance rénale, la confusion mentale, l'embolie pulmonaire ou la thrombose veineuse. « Beaucoup de personnes âgées sont hospitalisées pour « maintien à domicile impossible » et/ou « altération de l'état général ». Nous découvrons, à cette occasion, qu'elles sont atteintes du virus de la grippe et qu'elles en présentent, déjà, de multiples complications. Parce qu'il existe des présentations mal connues, les patients n'ont pas été diagnostiqués par leur médecin de ville alors même que le diagnostic précoce de la grippe (48 heures après le début des symptômes) pourrait permettre d'éviter un bon nombre de complications. Malheureusement, peu d'étudiants en médecine passent par un service de gériatrie », déplore le Pr Gavazzi. Résultat : les médecins de ville et, notamment, les généralistes ne sont pas assez formés à la prise en charge des patients âgés. Concernant la grippe, la prise en charge reste alors, trop souvent, tardive.
Des mesures pour mieux contenir la grippe
Pour mieux cerner l'impact direct de la grippe sur la santé des patients âgés dans les services hospitaliers et en EHPAD, la SFGG a mené une enquête déclarative, l'étude PUGG, prenant en compte plusieurs centaines de cas de grippe diagnostiqués lors de l'épidémie 2016/2017. Plus de 200 établissements ont participé à l'étude dont une soixantaine d'hôpitaux (services de maladies infectieuses et gériatrie) et plus de 150 EHPAD. Les objectifs étaient d'étudier les mesures d'hygiènes utilisées et leur impact sur les patients ou résidents ayant présenté une grippe confirmée. Présentées ce lundi 27 novembre lors des journées annuelles de la SFGG, les données montrent notamment un taux de vaccination des résidents contre la grippe de près de 90%, mais de moins de 50% contre les infections à pneumocoques. Chez les professionnels, le taux de vaccination est d'environ 30%. L'utilisation des traitements antigrippaux et des masques est très variable selon les établissements. En cas de grippe, les mesures d'isolement sont, en général, respectées et l'arrêt des admissions est fréquent dans les EHPAD. Sur les près de 500 cas de grippe analysés dans les MCO (services de médecine, chirurgie, obstétrique), le taux de mortalité intrahospitalier est supérieur à 10%, les complications nombreuses et la durée d'hospitalisation de plus de 15 jours. D'après les plus de 230 cas de grippe étudiés dans les EHPAD, le taux d'hospitalisation est de moins de 10% mais la mortalité atteint plus de 20%.
Si la prévention de la grippe par le biais des mesures d'hygiènes bien connues est nécessaire en ville comme dans les établissements hospitaliers et les EHPAD, la prévention grâce à la vaccination antigrippale des personnes de plus de 65 ans et de leur entourage (aidants, soignants…) devrait être systématique. « Une fois la grippe déclarée, le médecin de ville ou d'hôpital, doit pouvoir juger la gravité immédiate du patient après examen de son état général et de ses antécédents », précise le Pr Gavazi. Cela permet de mettre en œuvre rapidement le traitement et les mesures adaptées. « Dans notre unité hospitalière, par exemple, dès que 20 % de nos patients sont grippés, nous mettons en place un traitement préventif pour l'ensemble des patients hospitalisés pour contenir le virus et éviter les grippes nosocomiales. Par ailleurs, les règles d'hygiène sont bien respectées ; le port de masque notamment est systématique pour tous (patients et soignants) dès le début de l'épidémie. Cette prise en charge rapide de la grippe donne de bons résultats en termes de diminution du taux de grippe nosocomiale », assure le Pr Gavazzi.
D'après un entretien avec le Dr Gaëtan Gavazzi (CH Grenoble)
Article précédent
Développer la recherche sur la prévention
Le rôle essentiel de l'évaluation gériatrique
Bientôt un institut hospitalo-universitaire ?
Vers des moyens préventifs et thérapeutiques prometteurs
Anticiper les défis du vieillissement
Développer la recherche sur la prévention
Vers une prise en charge précoce
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024