De toutes les spécialités, la gériatrie est sans doute une des plus fortement engagées dans la télémédecine. « La téléconsultation est très plébiscitée dans les Ehpad. Ne nombreuses régions se sont aujourd’hui lancées dans l’organisation du suivi des résidents d’EHPAD par télémédecine. En Nouvelle Aquitaine, par exemple, une cinquantaine d’Ehpad utilisent déjà la télémédecine mais, d’ici la fin de l’année, plus de 400 devraient être équipés », indique le Pr Nathalie Salles, chef du service de gérontologie clinique au CHU de Bordeaux. Une gériatre qui connait particulièrement bien le dossier puisqu’elle préside la Société française de télémédecine.
Des téléconsultations avec différents spécialistes
Dans les Ehpad, c’est la téléconsultation qui est le plus souvent utilisée. Le résident est placé devant un écran en compagnie des soignants qu’il côtoie au quotidien. Il peut ainsi accéder à un médecin spécialiste sans avoir à quitter son univers habituel, ni à effectuer un déplacement, souvent fatiguant et stressant, à l’hôpital. « Cela permet de faire de la télémédecine au sens large et pas uniquement de la télégériatrie, comme je le lis très souvent. En effet, ces patients peuvent être amenés à consulter par ce biais un grand nombre de spécialistes différents : des cardiologues, des dermatologues, des diabétologues, des psychiatres, des neurologues… Le plus souvent, les Ehpad travaillent avec les spécialistes désignés par le généraliste traitant du résident. C’est toujours important pour nous d’agir en lien étroit avec les généralistes », indique le Pr Salles.
Les téléconsultations de gériatrie concernent, dans leur grande majorité, la prise en charge des troubles psycho-comportementaux liés à la maladie d’Alzheimer. « Cela permet d’observer la personne dans son univers quotidien. Et on constate que, dans la plupart des cas, les patients, quand ils sont en état de s’exprimer, ne sont pas perturbés par le fait de dialoguer avec un médecin via un écran. On s’est d’ailleurs rendu compte que ce sont les écrans de type télévision qui sont les plus adaptés. C’est plus difficile avec des tablettes. C’est logique car ce sont des générations qui sont habituées à la télévision », indique le Pr Salles, en ajoutant que les soignants, parfois un peu désemparés face au traitement de ces troubles du comportement, sont très demandeurs de ces téléconsultations.
Un autre avantage de la télémédecine est de permettre un accès plus rapide à une consultation spécialisée. « Pour les consultations classiques, les délais sont souvent longs à l’hôpital. En gériatrie, on est souvent au-delà de 3 mois d’attente, par exemple. Alors que là, on est organisés de telle manière dans le service qu’en 48 heures, il est souvent possible d’avoir un avis d’expert via une téléconsultation. Et c’est pareil pour les autres spécialités. Grâce à la télémédecine, il est souvent possible de consulter dans la semaine un psychiatre spécialiste des personnes âgées. Ce qui, hors urgence, ne serait pas envisageable autrement », indique le Pr Salles.
Vers la télé-expertise et la télé-assistance
La télé-expertise, réalisée entre deux professionnels sans la présence du patient, devrait aussi être amenée à se développer. « Nous avons mis en place un numéro unique pour que les généralistes puissent nous appeler lorsqu’ils sont face à une situation médicale complexe chez une personne âgée. Et on espère que ces échanges pourront donner lieu à une facturation de télé-expertise », indique le Pr Salles, en ajoutant que la télémédecine devrait aussi, à l’avenir, se développer au domicile des patients. En particulier par le biais des infirmières qui, au quotidien, sont en contact étroit avec les patients âgés. « Ces infirmières pourraient être équipées de tablettes par exemple et pourraient télé-assister, en quelque sorte, le médecin expert en téléconsultation, pour des problèmes de plaies difficiles à cicatriser par exemple ou des ajustements de traitement de diabète par insuline…».
D’après un entretien avec Pr Nathalie Salles, chef du service de gérontologie clinique au CHU de Bordeaux et présidente de la Société française de télémédecine.
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