Oncogériatrie

Pas d’anticancéreux sans repérage des fragilités

Publié le 17/11/2017
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Les patients âgés atteints de cancer sont souvent sous-traités. Les raisons ? Par méconnaissance, mais aussi sous-estimation de leur espérance de vie, et par la fausse idée que les cancers évoluent plus lentement à un âge avancé. Aussi est-il important de savoir en pratique comment s’effectue cette prise en charge.
Oncogériatrie

Oncogériatrie
Crédit photo : ARNO MASSEE/SPL/PHANIE

Aujourd’hui en France, plus de 1 000 cancers sont diagnostiqués chaque jour, dont 1/3 avant l’âge de 65 ans, 1/3 entre 65 et 75 ans et 1/3 après 75 ans. Ces chiffres ne pourront qu’augmenter avec le vieillissement de la population, dont 16,2 % aura plus de 75 ans en 2060.

L’oncogériatrie, qui associe gériatrie et cancérologie, est une discipline récente dont l’enjeu est d’améliorer la prise en charge des personnes âgées atteintes de cancer. Comme l’explique le Dr Djamel Ghebriou (PH, oncogériatre à l’Hôpital Tenon, Paris), l’objectif prioritaire est de mettre en balance les bénéfices/risques des traitements. La philosophie qui guide cette prise en charge peut être illustrée par l’image de l’escalier : un patient est sur une marche à un instant « t » avec son autonomie, ses comorbidités, sa fragilité potentielle, et son environnement psychosocial. La survenue d’un évènement aigu (traumatique, chirurgical ou médical) peut lui faire « dégringoler » d’un seul coup l’escalier (altération de l’autonomie, décompensation de comorbidités, etc.). Grâce à une prise en charge adaptée, il remontera l’escalier, mais jamais tout à fait jusqu’à la marche initiale. En oncogériatrie, il faut donc absolument éviter cette « dégringolade ». Or, une chimiothérapie mal tolérée ou une chirurgie chez un patient fragile peuvent en être responsables.

L’évaluation est indispensable

En oncogériatrie, l’évaluation gériatrique approfondie est essentielle avant toute prise de décision thérapeutique. En effet, l’âge civil n’est pas un critère suffisant pour définir l’état de santé d’un patient âgé, son espérance de vie ou la tolérance à un traitement anticancéreux. D’ailleurs, il n’existe pas de normes pour définir le seuil de la vieillesse. Un consensus le place au-delà de 75 ans, âge auquel apparaissent généralement les comorbidités. Pour identifier les patients âgés atteints de cancer qui présentent une vulnérabilité ou une fragilité gériatrique, les recommandations de bonne pratique préconisent d’utiliser le G8, un outil de dépistage dont la généralisation de son l’utilisation est inscrite dans le plan cancer 2009-2013. Ce questionnaire comprend huit items assez généraux permettant d’obtenir un score. Parmi les données évaluées : une perte de poids récente, la prise de médicaments supérieure ou inférieure à trois, l’indice de masse corporelle, la motricité du patient, etc.

Un résultat avec un score inférieur ou égal à 14, ce qui est le cas de 70 % des patients, impose de réaliser une évaluation gériatrique approfondie et de proposer une prise en charge adaptée. Plus le score est bas, plus le résultat est jugé « péjoratif ». En oncogériatrie, il n’est pas possible de proposer des recommandations de prise en charge thérapeutique sans tenir compte des nombreux autres éléments (comorbidité, polymédication, isolement social, etc.) qui peuvent compromettre le bon déroulement du traitement. Certains traitements proposés par les équipes d’oncogériatrie sont très bien tolérés, n’ont pas de toxicité et peuvent être proposés à des patients même très âgés.

Quand les IPP ou les antibios perturbent la chimio

Les généralistes doivent bien prendre en considération les traitements oncologiques mis en place par les équipes de soins. Et la prudence est de rigueur en cas de nouvelle prescription chez un patient traité pour un cancer. Par exemple, un simple IPP prescrit pour des brûlures gastriques peut drastiquement diminuer l’efficacité d’une thérapie ciblée, une antibiothérapie pourrait également perturber l’efficacité d’une immunothérapie, rapporte un article paru début novembre dans Science.
En cas de problème, il est toujours possible de joindre l’équipe d’oncologie pour en discuter. La plupart des services hospitaliers ont des gardes d’astreinte qui permettent aux médecins d’obtenir des conseils ou des informations. Les consultations d’oncogériatrie en Île-de-France sont répertoriées sur le FROG (voir encadré).

L’oncogériatrie en pratique

Le FROG (FRancilian Oncogeriatric Group) réalise des formations en oncogériatrie et met gracieusement à la disposition des médecins intéressés deux petits cahiers d’oncogériatrie pratique*. La 2e édition à paraître début 2018 comprendra également une application sur smartphone et tablettes.
* Kephren Publishing EURL, 88, rue du Drome, 92100 Boulogne Billancourt.


Dr Pascale Ogrizek

Source : lequotidiendumedecin.fr