La chirurgie bariatrique s’accompagne d’une amélioration spectaculaire de l’équilibre glycémique chez la majorité des diabétiques (1). Le concept de « chirurgie métabolique » s’applique à chacune des quatre interventions bariatriques couramment pratiquées en France, l’anneau gastrique, la gastrectomie longitudinale ou gastrectomie en manchon (sleeve gastrectomy), le bypass gastrique et la dérivation bilio-intestinale. L’efficacité métabolique des interventions est globalement corrélée à leur efficacité pondérale. Elles peuvent permettent d’obtenir chez des patients obèses et diabétiques un meilleur équilibre glycémique que la seule prise en charge médicale. Même lorsque la rémission n’est pas complète, la chirurgie permet une diminution durable de l’hémoglobine glyquée d’au moins 1,5 %. Dans l’étude STAMPEDE, très récemment publiée, la chirurgie bariatrique a permis d’obtenir un taux hémoglobine glyquée inférieur à 6 % pendant une durée de suivi de 3 ans (2).
Restriction calorique et effets intestinaux
La chirurgie sur le métabolisme glucidique entraîne une intense restriction calorique dont le retentissement sur le métabolisme glucidique est majeur. L’un des principaux déterminants de l’effet métabolique au long cours de la chirurgie reste par ailleurs la perte pondérale. L’intense perte de poids induite par toutes les interventions s’accompagne mécaniquement d’une diminution majeure de l’insulinorésistance. Elle semble également liée à une plus grande efficacité de l’insuline dans le muscle, ainsi qu’à la diminution de la stéatose hépatique après chirurgie.
Les interventions comprenant une dérivation intestinale comme le bypass gastrique et la dérivation bilio-intestinale affectent par ailleurs de façon très significative la sécrétion de l’insuline. Elles augmentent en effet le taux de GLP-1 (glucagon-like peptide-1) sécrété après la prise alimentaire et améliore ainsi la réponse insulinique (3).
D’autres modifications intestinales pourraient elles aussi contribuer à améliorer le métabolisme glucidique. L’accélération de la vidange gastrique induite par la gastrectomie longitudinale semble contribuer au retentissement favorable de cette intervention sur la glycémie postprandiale. La chirurgie pourrait aussi moduler le métabolisme énergétique en modifiant le microbiote intestinal et la production par les bactéries endoluminales de lipopolysaccharides pro-inflammatoires ou encore en altérant le cycle entérohépatique des acides biliaires.
Ainsi, initialement proposée pour traiter l’obésité, la chirurgie bariatrique induit d’indéniables bénéfices sur le métabolisme glucidique, voire une authentique rémission du diabète de type 2 chez de nombreux patients. Chaque intervention s’accompagne néanmoins de risques spécifiques non négligeables. Une évaluation pré-opératoire multidisciplinaire et un suivi attentif, la vie durant, restent indispensables. Formidable modèle expérimental, la chirurgie bariatrique permettra aussi d’ouvrir de nouvelles pistes pour la compréhension du diabète de type 2 (1).
L’effet de la chirurgie ne permet enfin que de préjuger de son influence sur les complications chroniques du diabète et sur la réduction de la mortalité des diabétiques. Le bénéfice clinique de chaque intervention reste à démontrer par des essais contrôlés.
* Chirurgie Endocrinienne, CHRU, Lille, et Inserm U859 - Biothérapies du Diabète, Université Lille Nord de France
Déclaration d’intérêts : aucun
(1) Pattou F. Surgery and diabetes mellitus. e-mémoires de l’Académie Nationale de Chirurgie 2011; 10: 86–90.
(2) Schauer PR, Bhatt DL, Kirwan JP, Wolski K, Brethauer SA, Navaneethan SD, et al. Bariatric Surgery versus Intensive Medical Therapy for Diabetes — 3-Year Outcomes. N Engl J Med 2014; 370: 2002–2013.
(3) Knop FK, Taylor R. Mechanism of Metabolic Advantages After Bariatric Surgery: It`s all gastrointestinal factors versus it’s all food restriction. Diabetes Care 2013; 36: S287–S291.
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