UNE CAUSE ORGANIQUE est retrouvée dans environ 20 % des autismes, selon une étude menée par le Pr Arnold Munnich et son équipe chez des enfants accueillis en hôpital de jour. Le pédiatre généticien plaide pour que les enfants présentant des troubles autistiques bénéficient d’examens cliniques et complémentaires précoces et répétés. Une démarche qu’il estime être un devoir pour le médecin et un droit pour l’enfant.
Entre 1998 et 2009, une collaboration s’est établie entre cinq hôpitaux de jour, appartenant à l’association l’Élan retrouvé et l’université Paris Descartes, autour de la recherche d’une cause organique chez des enfants accueillis pour un syndrome autistique. Cette étude clinique a inclus 179 jeunes autistes. Les parents, dont l’accord était systématiquement sollicité, l’ont tous donné, manifestant ainsi une totale adhésion à cette démarche dont ils regrettaient souvent qu’elle n’ait pas été entreprise plus tôt. L’étude comportait une anamnèse avec, comme dans toute consultation de génétique, la construction d’un arbre généalogique, un examen clinique complet de l’enfant, la prise de photos (et le recueil de photos de l’enfance pour les adolescents et les adultes) et un certain nombre d’examens complémentaires systématiques.
Formes atypiques, syndromiques et déficitaires.
Au total, sur les 179 cas explorés, 20 diagnostics différents ont été établis chez 33 patients. Une cause organique a donc été identifiée dans près de 20 % des cas. « Les chances de parvenir à un diagnostic de maladie organique sont une fonction linéaire de l’énergie qu’on y met », observe le Pr Munnich. Ces étiologies organiques, précise-t-il, sont retrouvées le plus souvent dans les formes atypiques, syndromiques et déficitaires.
Dans certains cas, la cause organique d’un syndrome autistique est identifiée au bout de 5 ans, 10 ans, voire plus. Il est donc essentiel que ces enfants soient examinés et explorés le plus précocement possible et que ces explorations soient régulièrement actualisées, d’autant que les connaissances évoluent.
Dans l’étude menée par l’équipe du Pr Munnich, l’IRM anatomique était anormale dans 54 % des cas, avec essentiellement des anomalies des lobes temporaux et de la substance blanche et plus accessoirement une dilatation des espaces de Virchow. L’IRM avec spectroscopie a conduit à identifier 12 cas de déficit en créatine, parfaitement accessibles à un traitement.
L’IRM fonctionnelle est une méthode en pleine expansion depuis quelques années, qui a également beaucoup contribué à l’étude de l’autisme ; elle a ainsi permis de retrouver, chez les enfants autistes, une hypoperfusion temporale d’autant plus importante que le syndrome autistique est sévère. Une inactivation de l’aire de la voix a également été constatée chez certains de ces enfants.
De nouvelles entités génétiques.
La cytogénétique a fait de considérables progrès. Le CGH array, qui remplace désormais le caryotype devenu obsolète, permet, en confrontant l’ADN du patient à un ADN de référence, de mettre en évidence délétions et duplications. De nouvelles entités génétiques ont ainsi été décrites chez les autistes, dont la plus fréquente est la microdélétion 22q13-3 d’un gène codant pour une protéine d’assemblage indispensable à la structure de la membrane postsynaptique des synapses glutamatergiques.
L’équipe d’Arnold Munnich a également identifié un sous-groupe d’enfants autistes qui présentaient un retard psychomoteur, une microcéphalie, une hyperprotéinorachie et des calcifications de la base du crâne, et chez lesquels l’exploration génétique a mis en évidence une mutation du gène AP1S2 codant pour une sous unité du complexe des clathrines, un complexe protéique de l’enveloppe de certaines protéines de transmission liées à l’X.
La maladie psychique doit être explorée.
L’autisme est non pas une maladie mais un symptôme, qui peut être sous-tendu par des mécanismes divers. « La maladie psychique doit être explorée comme toute autre maladie, c’est un devoir pour le médecin et un droit pour l’enfant », considère Arnold Munnich. Cette démarche, explique-t-il, n’est pas exclusive des approches psychothérapiques, au contraire. Il est tout à fait concevable que des mécanismes très différents, organiques ou psychodynamiques, concourent à un même symptôme. Et il faut se garder des affrontements dogmatiques, de cette diabolisation dont la génétique fait encore l’objet aujourd’hui. « Nous devons travailler ensemble, plaide le pédiatre généticien, dans une relation de confiance et de respect mutuel. C’est une expérience formidable et un bénéfice réel pour les enfants et leur famille ».
D’après la communication du Pr Arnold Munnich (Hôpital Necker-Enfants Malades).
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