Les données épidémiologiques sur l’incidence de la personnalité paranoïaque sont assez similaires dans tous les pays développés : 0,3 à 4,4 % de la population générale, 2 à 10 % des patients psychiatriques externes et 10 à 30 % des patients hospitalisés. « La paranoïa a une réputation classique de dangerosité, mais cette question n’a que très rarement fait l’objet d’études en raison de sa relative rareté et de son absence d’individualisation dans les classifications internationales », a expliqué le Dr Patrick Le Bihan (Cadillac). La paranoïa ou le trouble délirant n’apparaissent pas de façon spécifique, on parle plutôt de « troubles du spectre schizophrénique » ou de « psychoses non schizophréniques ».
Parmi les critères diagnostiques (CIM-10) de la personnalité paranoïaque, on trouve : une sensibilité excessive aux échecs et aux rebuffades, un refus de pardonner les insultes ou les préjudices et une tendance rancunière tenace, un caractère soupçonneux et une tendance envahissante à déformer les événements en interprétant les actions impartiales ou amicales d’autrui comme hostiles ou méprisantes… La personnalité paranoïaque est fréquemment associée à un autre trouble de la personnalité : schizoïde ou schizotypique, ou borderline, narcissique et antisocial. La paranoïa peut aussi se compliquer de manifestations hypocondriaques ou de somatisations associées à des revendications envers le médecin accusé d’incompétence ou de négligence, qui conduisent à des plaintes au conseil de l’Ordre, à l’administration hospitalière ou à la justice. Sont également décrits des délires paranoïaques d’apparition progressive, des épisodes psychotiques transitoires, un abus ou une dépendance à l’alcool et à d’autres substances psychoactives. Les complications sont assez habituelles : difficultés relationnelles, sociales, professionnelles qui peuvent conduire à des dénonciations calomnieuses. « Vindicatif, justicier, avare et même altruiste, le paranoïaque se trouve souvent entraîné à commettre des délits et des crimes (agressions contre des inconnus ou la police, violences familiales etc.) » a souligné le Dr Le Bihan.
Uxoricide et érotomanie.
Indépendamment des évolutions délirantes, des passages à l’acte violents allant jusqu’à l’homicide peuvent survenir, sous-tendus par des idées de jalousie, de préjudice ou de persécution. Ils s’inscrivent dans des réactions passionnelles lors d’échec ou de frustration. Les victimes sont généralement connues (connaissances, conjoints, parents). Le risque suicidaire est important et il peut parfois être associé à un homicide préalable (dans un délai court, inférieur à 24 heures) du conjoint (uxoricide) ayant pour motif la jalousie obsessionnelle (infidélité de l’épouse réelle ou imaginaire). On note également un certain nombre d’iatricides (homicides envers les soignants) : peur d’être empoisonné ou tué, vengeance (« le faire souffrir autant qu’il m’a fait souffrir »). Cet acte peut être prémédité ou parfois précipité par un événement anodin.
Enfin, l’érotomanie est fréquente. Elle passe par trois phases : l’espoir (poursuites incessantes : appels, lettres d’amour…), le dépit devant l’absence de réponse et la rancune avec les menaces, injures, scandales publics et un risque auto- ou hétéroagressif.
D’après la communication du Dr Patrick Le Bihan (Cadillac).
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