Prédictive, préventive, personnalisée et participative

Avancées vers la médecine 4P

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Publié le 23/01/2020
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Une médecine permettant de mieux segmenter les populations, les traitements et les programmes de prévention, en accord avec les patients ? Les 4P sont porteuses d’espoirs pour de nombreuses pathologies, notamment respiratoires.
Associés aux décisions, les patients deviennent plus responsables

Associés aux décisions, les patients deviennent plus responsables
Crédit photo : phanie

La médecine 4P (prédictive, préventive, personnalisée et participative) est en marche grâce à de nouveaux outils qui permettent d’ores et déjà dans certains cas de prédire, chez des sujets en bonne santé, la survenue de telle ou telle maladie et, chez des patients, de prévoir l’évolution de leur maladie. « Dès lors, il est possible de mettre en place une prévention personnalisée s’adressant à des sous-populations ciblées, à risque, ainsi qu’une prise en charge adaptée selon les individus. C’est ce qui se fait déjà pour certaines maladies chroniques, notamment cardiovasculaires », explique le Pr Antoine Magnan (CHU de Nantes). Et, avec la médecine participative, les patients sont associés aux décisions. Ils deviennent plus responsables en ce qui concerne leur santé et leurs soins.

Ce concept des 4P s’est particulièrement développé ces dernières années en oncologie, avec l’identification de cibles thérapeutiques de plus en plus précises, de biomarqueurs à visée pronostique, l’arrivée des thérapies ciblées, la possibilité de prévention des récidives, la médecine participative… Tout cela a permis une meilleure prise en charge. La décision concernant la stratégie thérapeutique est désormais prise à la suite de réunion de concertation pluridisciplinaire entre professionnels de santé. Celle-ci est soumise et expliquée au patient afin d’aboutir à une décision partagée, et pour qu’il accepte les options qui lui sont proposées. « Le cancer fait de plus en plus partie des maladies chroniques. Les patients ont vu leur durée de vie augmenter. Dans leur suivi, il faut alors les accompagner à chaque étape de façon personnalisée », souligne le Pr Magnan.

« La médecine 4P s’applique également bien à l’asthme », ajoute-t-il. Des tests permettent aujourd’hui de différencier les divers phénotypes (allergiques, éosinophiliques…) et de décomposer des sous-groupes, qui peuvent bénéficier de thérapeutiques ciblées. Ce qui est crucial chez les patients asthmatiques sévères non contrôlés (anti IgE, anti-IL5, anti-IL4, anti-IL13). Les mesures de biomarqueurs permettent de guider le choix, mais les facteurs prédictifs de bonne réponse ont encore besoin d’être précisés.

Dans le domaine de l’allergie, aussi, la médecine 4P peut être envisagée. Une stratégie préventive personnalisée devrait pouvoir se mettre en place. L’implication du microbiote intestinal a, notamment, été soulignée dans plusieurs études. « On peut ainsi espérer qu’une intervention précoce chez des enfants à risque (dont les deux parents sont allergiques), en modifiant le microbiote intestinal par un apport spécifique en probiotiques pourrait contribuer à prévenir les allergies », explique le Pr Magnan.

Des cohortes d'envergure

« C’est grâce à des études sur de très larges cohortes de citoyens que sont récoltées des données de santé qui permettront de cibler réellement les populations vis-à-vis des mesures de prévention », souligne le spécialiste.La prédictibilité change ainsi l’approche de la prévention et de la personnalisation du traitement. De grands espoirs en perspective, « mais il faut aussi ajouter un cinquième P : celui de la preuve et de la pertinence des stratégies proposées », insiste le Pr Magnan.

Entretien avec le Pr Antoine Magnan, CHU de Nantes

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin