Un démembrement de l'asthme sévère

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Publié le 23/01/2020
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Une inflammation au caractère très hétérogène

Une inflammation au caractère très hétérogène
Crédit photo : phanie

Les recommandations ERS/ATS dans l’asthme sévère, mises à jour en 2019, reprennent la définition faite en 2014. En revanche, elles mettent en avant la recherche de biomarqueurs qui permettent de choisir un traitement biologique ciblé et tiennent compte des dernières études.

Est défini comme asthme sévère (traitement de stade 4-5 Gina), tout asthme confirmé et correctement traité (adhésion au traitement, observance thérapeutique et prise en charge des comorbidités) nécessitant de fortes doses de corticoïdes inhalés associés à une autre classe thérapeutique ou l’utilisation d’une corticothérapie systémique pour contrôler l’asthme ou demeurant non contrôlé malgré ces traitements.

On dispose aujourd’hui de biothérapies qui permettent de contrôler l’asthme sévère, diminuent les exacerbations et réduisent le recours aux corticoïdes et donc les risques liés à l’usage d’une corticothérapie orale au long cours (effets secondaires, comorbidités).

« L’inflammation de l’asthme, y compris sévère, est très hétérogène. Toute biothérapie ne marche pas systématiquement, d’où l’importance donnée actuellement au phénotypage… Qui ne date d'ailleurs pas d'hier : asthme exacerbé par l’aspirine, par les AINS, asthme allergique, etc. Mais, à part quelques mesures préventives, cela n’avait jusqu'alors pas trop d’impact thérapeutique, explique la Dr Cécile Chenivesse (CHRU de Lille). Les premiers essais conduits avec le mepolizumab ont remis l’accent sur l’importance du phénotypage, car ils étaient négatifs dans une population d’asthme non sélectionnée. »

Pas de biomarqueur idéal

Le phénotypage passe par le recueil de données cliniques : examen clinique, biologie standard, EFR. « Il n’existe pas encore de biomarqueur idéal », prévient la Dr Cécile Chenivesse. Cela permet toutefois d’évaluer la probabilité du mécanisme inflammatoire prédominant. On peut ainsi définir deux grands phénotypes : inflammatoire ou Th2 (allergique et/ou éosinophilique) et le phénotype non Th2, dont les mécanismes sont encore peu connus. Pour ce dernier, « le traitement reste la thermoplastie bronchique et la corticothérapie orale, parfois les macrolides au long cours, le méthotrexate ou le tiotropium… le problème n’est pas réglé », note la Dr Cécile Chenivesse.

Les biothérapies ciblent les asthmes sévères de type 2. Plusieurs se sont déjà montrées efficaces. « Le phénotype allergique peut être défini par certains éléments cliniques : asthme précoce, rhinite allergique, sensibilisation (prick Test, IgE spécifique). Le phénotype éosinophilique est quant à lui défini par un asthme tardif, une polypose nasosinusienne, des éosinophiles circulants », ajoute la Dr Chenivesse.

Un anti-IgE, l’omalizumab, est recommandé en cas d’asthme allergique sévère. D’autres anticorps monoclonaux dirigés contre l’IL 5 (mépolizumab, reslizumab) ou contre son récepteur cellulaire (anti-IL 5R : benralizumab) sont indiqués en cas d’asthme éosinophilique sévère. Un anti-IL 4R (dupilumab) est également recommandé en cas d’asthme sévère de type 2.

Une articulation reste à trouver

« De nombreuses questions restent en suspens : dans les formes mixtes (allergique et éosinophilique), quelle biothérapie faut-il favoriser en première intention ? Lorsque l’on a le choix, quelle biothérapie choisir ? Quels sont les facteurs de réponse au traitement ? », liste la Dr Chenivesse. C’est dans cette optique que l’étude pragmatique multicentrique Predictumab 01 se met en place en Europe.

Entretien avec la Dr Cécile Chenivesse (CHRU de Lille)

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin