Les trous de couverture vaccinale, accidents de parcours

La fabrique des non-vaccinés

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Publié le 06/11/2017
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Crédit photo : PHANIE

Le parcours vaccinal est sans doute le premier parcours de soins que doit suivre un patient. Comme tout parcours, il a son protocole… et ses loupés. Par exemple, 29 % des enfants de deux ans n’ont, d’après les chiffres de Santé Publique France, pas reçu la deuxième dose du vaccin contre les infections à méningocoque C, pourtant recommandée. S’ils ont pu passer à travers les mailles du filet, c’est notamment parce que le chemin de l’immunisation est jalonné d’étapes qui sont autant d’échappatoires.

En effet, la couverture vaccinale est loin d’être homogène. Toujours d’après Santé Publique France, 97 % des enfants de deux ans ont reçu les deux doses requises des trois seuls vaccins obligatoires à l’heure actuelle (diphtérie, tétanos et poliomyélite : le fameux DTP). Pour la coqueluche et les infections à haemophilus influenzae B, presque toujours administrés dans la même injection que les vaccins obligatoires, la couverture est de 96 %.

Portes de sortie

C’est quand on s’intéresse aux autres maladies que les portes de sortie commencent à apparaître. Par exemple, la couverture de la vaccination contre les infections à pneumocoque, effectuée en même temps que les trois vaccins obligatoires, mais dans une injection séparée, est un peu moins satisfaisante : 9 % des enfants y échappent.

Pour ce qui concerne la deuxième dose de vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR), le chiffre s’approche des mauvais résultats du méningocoque : 21 %. Comment faire pour que les enfants respectent le parcours vaccinal ? Bien sûr, l’extension de l’obligation est une réponse. Mais ce n’est pas la seule. La force de conviction des médecins a aussi un rôle à jouer.

Cibler la masse des hésitants

« Certes, il y a des parents qui sont totalement opposés à la vaccination, reconnaît le Dr François Vié Le Sage, membre de la commission scientifique de l’Association française de pédiatrie ambulatoire (AFPA). Pour eux, c’est du domaine de la foi : ils viennent d’ailleurs rarement nous voir, ou alors par erreur. »

Les efforts doivent donc d’après ce praticien porter sur « la masse des gens hésitants, qui ont entendu des messages négatifs sur la vaccination dans les médias ou sur les réseaux sociaux ». Le rôle du médecin est ici crucial, car comme le rappelle François Vié Le Sage, « l’élément déterminant dans la décision des parents est l’avis du professionnel de santé que les parents ont choisi ».

Les médecins hésitent aussi

Et c’est là que le bât blesse : 26 % des praticiens considèrent que certains vaccins recommandés par les autorités sont inutiles. Tels sont en tout cas les résultats d’une enquête* menée conjointement en 2015 sur un panel de 1 700 généralistes par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), trois Observatoires régionaux de la santé (ORS) et trois Unions régionales des professions de santé (URPS).

« Ces chiffres montrent que les médecins partagent un certain nombre des perceptions du grand public », analyse le Dr Pierre Verger, chercheur en santé publique à l’INSERM et directeur de l’ORS Provence-Alpes-Côte d’Azur qui a coordonné ces travaux. Mais pour François Vié Le Sage, ce n’est pas une fatalité. La solution consiste selon lui à améliorer la formation des médecins en vaccinologie. « S’ils sont convaincus, ils seront convaincants », veut-il croire.

* Vaccinations : attitudes et pratiques des médecins généralistes. Drees, Études et Résultats n° 910, mars 2015

Adrien Renaud

Source : Le Quotidien du médecin: 9616