Tabac, alcool, alimentation et inactivité physique contribuent jusqu’à 70 % des différences sociales de mortalité. Autant de comportements qu’il est possible de modifier au travers de messages préventifs. Mais ces messages de « bonne santé » sont-ils dispensés de façon identique que l’on soit ouvrier, cadre ou sans ressources ? Les pratiques préventives au cabinet ont-elles tendance à réduire ou au contraire à augmenter les inégalités sociales dans les comportements de santé ?
En fonction de la position sociale des patients, à savoir leur profession, leur niveau de diplôme et leur situation financière, le message en vue d’améliorer leurs habitus sera différent. Dans cette étude, la consommation d’alcool et de tabac était plus souvent recherchée par le généraliste chez les hommes du bas de la hiérarchie sociale, tandis que chez les femmes, la question n’était même pas mentionnée. L’évaluation du risque CV était aussi plus adaptée chez les hommes que chez les femmes. « La prévention primaire chez les femmes est moins bonne parce que moins bien évaluée, déclare Laurent Rigal. Il existe des stéréotypes chez les médecins qui du coup promeuvent le message de prévention plus souvent chez les hommes du bas de la hiérarchie. »
« Le médecin a été formé à la prise en charge de la pathologie aiguë, la prévention comme acte thérapeutique n’a pas encore été complètement intégrée à la pratique », précise Laurent Rigal. Même si prêcher la bonne parole est nécessaire, demander à un individu de modifier ses comportements nécessite aussi que l’organisation collective du système de soins et plus largement de la société favorise ces changements.
Messages différents
À travers une étude observationnelle transversale - PrevQuanti - sur plus de 2 500 patients consultant en cabinet de médecine générale, le Dr Laurent Rigal, généraliste, membre du département de médecine générale de Paris Descartes et chercheur associé à l’Inserm, a confirmé qu’en médecine générale les pratiques de promotion de la santé sont socialement différenciées. Même si le serment d’Hippocrate veut que tout médecin « …écoute, examine, conseille ou soigne avec la même conscience toutes les personnes quelles que soient leur origine, leurs mœurs et leur situation sociale… », la réalité est toute autre.En fonction de la position sociale des patients, à savoir leur profession, leur niveau de diplôme et leur situation financière, le message en vue d’améliorer leurs habitus sera différent. Dans cette étude, la consommation d’alcool et de tabac était plus souvent recherchée par le généraliste chez les hommes du bas de la hiérarchie sociale, tandis que chez les femmes, la question n’était même pas mentionnée. L’évaluation du risque CV était aussi plus adaptée chez les hommes que chez les femmes. « La prévention primaire chez les femmes est moins bonne parce que moins bien évaluée, déclare Laurent Rigal. Il existe des stéréotypes chez les médecins qui du coup promeuvent le message de prévention plus souvent chez les hommes du bas de la hiérarchie. »
« La promotion de la santé est bien inhomogène »
Une différence que l’on retrouve également concernant les conseils d’activité physiqueen défaveur du bas de l’échelle sociale chez les hommes comme chez les femmes. Les conseils dispensés vers les patients socialement favorisés contribuent ainsi aux inégalités. « Le médecin manque d’outils, de temps pour adapter son message qui se fera donc plus facilement vers des gens plus réceptifs », explique Laurent Rigal. Mais le plus étonnant concerne la promotion du dépistage du cancer du col avec cinq fois moins de dépistage chez les femmes de catégorie sociale basse, ce qui fait de ce soin le plus inégalitaire.« Le médecin a été formé à la prise en charge de la pathologie aiguë, la prévention comme acte thérapeutique n’a pas encore été complètement intégrée à la pratique », précise Laurent Rigal. Même si prêcher la bonne parole est nécessaire, demander à un individu de modifier ses comportements nécessite aussi que l’organisation collective du système de soins et plus largement de la société favorise ces changements.
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