La fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) est une pneumopathie interstitielle sévère, fréquente parmi les maladies rares (20/100 000). Elle résulte d’une prolifération des fibroblastes, épaississement de l’interstitium, sécrétion collagène, différenciation et migration.
À l’examen sont retrouvés une toux sèche et/ou un essoufflement à l’effort, des râles crépitants et un hippocratisme digital, typiquement chez un fumeur entre 55 et 65 ans, plus souvent des hommes. Le délai moyen du diagnostic est de 1 à 2 ans après l’apparition des symptômes.
« Le diagnostic doit systématiquement être évoqué en présence du diptyque toux sèche ou dyspnée d’effort plus crépitant : cela suppose d’interroger la dyspnée, le patient ayant tendance à la minimiser. Il se fait par scanner, dont l’analyse correcte est un élément majeur », explique le Pr Benoît Wallaert (CHRU de Lille, centre de compétence des maladies pulmonaires rares). Des recommandations françaises pour le diagnostic et la prise en charge de la FPI ont été publiées en décembre 2013 (1).
Bien que la cause de la FPI soit inconnue, des facteurs de risque ont été identifiés : tabagisme, pollutions environnementales, infections virales chroniques, reflux gastro-œsophagien, antécédents familiaux. Sa prévalence augmente depuis 30 ans, sans que l’on sache pourquoi. La théorie physiopathologique actuelle est que la FPI se déclenche après une longue phase asymptomatique accumulant des agressions pulmonaires.
L’évolution se fait par un déclin progressif de la capacité respiratoire, couplé à des exacerbations, qui marquent des paliers pronostiques. La survie moyenne est de 3 ans après le diagnostic, et la survie à un an après la survenue d’une exacerbation est de 10 à 20 % seulement. Celle-ci conduit aussi toujours à la mise sous oxygène, dont le débit peut être élevé. L’éducation thérapeutique respiratoire mais aussi multidisciplinaire incluant le projet de vie du patient tient ainsi une place importante dans la prise en charge, qui se fait, depuis le plan maladie rare 2006, dans des centres spécialisés.
L’arsenal thérapeutique était jusqu’à présent réduit, se limitant à un traitement non curatif (pirfénidone, Esbriet) qui ralentit la progression pendant les 6 premiers mois seulement (pour un coût d’environ 24 000 €/an), ou une greffe pulmonaire, quand celle-ci est possible.
Après de nombreux échecs, l’horizon s’est éclairci récemment, avec une vingtaine de biothérapies ciblées en développement, qui ont montré pour la première fois des résultats encourageants. Le nintedanib (Boehringer Ingelheim) est un inhibiteur de tyrosine kinase (ITK) sous statut de médicament orphelin en Europe, aux États-Unis (fast track FDA depuis juin 2013) et au Japon. Il bloque les voies de signalisation impliquées dans les processus fibrotiques : récepteur du facteur de croissance de l’endothélium vasculaire (VEGFR), du facteur de croissance des fibroblastes (FGFR) du facteur de croissance dérivé des plaquettes (PDGFR).
L’essai de phase II Tomorrow, randomisé en double aveugle versus placebo, mené dans 25 pays, a étudié efficacité et tolérance de quatre posologies de nintedanib (50 mg une et deux fois par jour, 100 mg 2X/j, 150 mg 2X/j) pendant 12 mois chez 432 patients atteints de FPI (2). Le critère primaire est le taux annuel de déclin de la capacité vitale forcée (CVF), les critères secondaires sont les exacerbations aiguës, la qualité de vie (questionnaire SGRQ), la capacité pulmonaire totale.
– 68% de déclin de la CVF
Chez les patients traités avec 150 mg de nintedanib deux fois par jour, la CVF a décliné de 0,006 litre en une année, contre 0,19 l sous placebo, soit une diminution de 68 % du déclin de la CVF.
Le nombre d’épisodes d’exacerbations aiguës a été réduit de 85 % (2,4 vs 15,7 pour 100 années patients, p = 0,002).
L’incidence des événements indésirables (totaux, sévères, comme nécessitant une hospitalisation) a été comparable dans les deux groupes.
Ces résultats encourageants devront être confrontés à ceux de deux études pivot de phase III (INPULSIS 1 et 2), attendues pour le congrès américain de l’ATS, en mai 2014.
D’après les sessions du 18e Congrès de pneumologie de langue française (CPLF) et une conférence de presse organisée par Boehringer Ingelheim.
(1) Cottin V et al. Recommandations pratiques pour le diagnostic et la prose en charge de la fibrose pulmonaire idiopathique. Élaborées par le centre national de référence et les centres de compétence pour les maladies pulmonaires rares sous l’égide de la société de pneumologie de langue française. Revue des maladies respiratoires. 2013(30):879-902.
(2) Richeldi L et al. Efficacy of a tyrosine kinase inhibitor in idiopathic pulmonary firbosis. N Engl J Med 2001. 365 ;12:1079-87.
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