« En général, les patients présentant un traumatisme crânien léger (TCL) n’ont pas ou très peu d’altérations neurologiques, pas de lésion dans le cerveau. Le traumatisme crânien peut avoir provoqué une perte de connaissance immédiate. Le patient peut avoir de légers maux de tête, quelques vertiges et/ou un état somnolent », souligne le Dr Cédric Gil-Jardiné, médecin urgentiste au CHU de Bordeaux, qui présentait les nouvelles recommandations de la Société française de médecine d’urgence (SFMU) au congrès. Les précédentes dataient de dix ans. « Depuis, de nombreuses études ont été publiées sur les TCL dans les services d’urgence. Cette littérature scientifique a permis de faire évoluer la prise en charge », indique le Dr Gil-Jardiné.
Stratifier le niveau de risque
Ce nouveau texte propose avant tout de stratifier les patients selon le niveau de risque de présenter des lésions intracrâniennes visibles sur un scanner. Pour les patients dont le risque est élevé, les modalités de prise en charge n’ont pas beaucoup changé : il faut effectuer un scanner, le plus rapidement possible. « Pour les patients à risque intermédiaire, les nouvelles recommandations comportent deux modifications essentielles. Elles marquent la disparition de l’attente nécessaire avant la réalisation du scanner [auparavant entre 4 et 8 heures après le traumatisme]. Aujourd’hui, nous ne préconisons d’attendre, du fait de l’amélioration de la qualité des scanners. Aussi, quel que soit son niveau de risque, lorsque le patient ne présente plus d’anomalies cliniques, il peut regagner son domicile si le scanner est normal. Cette mesure permet d’améliorer le roulement aux urgences », note le Dr Gil-Jardiné.
Limiter le recours au scanner
Le texte propose aussi pour la première fois de recourir à des biomarqueurs sanguins. Lorsqu’ils sont bas, on peut se passer de scanner. « Cela permet de limiter l’attente dans les services d’urgences, mais aussi l’irradiation liée au scanner », souligne le Dr Gil-Jardiné.
Les nouvelles recommandations évoquent la nécessité de mettre en place des filières d’évaluation post-traumatisme crânien. « Nous savons qu’une partie non négligeable des patients présentent des troubles langagiers, cognitifs ou neuropsychologiques, à distance du traumatisme. Il faut en informer les patients et travailler au niveau de chaque centre hospitalier disposant d’une structure d’urgence, afin de pouvoir identifier des partenaires (en ville ou à l’hôpital) pouvant prendre en charge ces troubles », explique le Dr Gil-Jardiné.
Collaborer avec le médecin traitant
Il n’existe pas à ce jour de filière spécifique permettant d’impliquer le médecin traitant dans la prise en charge du patient ayant présenté un TCL. « Celui-ci a un rôle clé à jouer en cas de symptômes invalidants survenant chez son patient quelques semaines, voire quelques mois après son TCL. Le lien entre ces symptômes et le traumatisme n’est pas toujours facile à établir, notamment chez le sujet âgé. Nous sommes en train de réfléchir à un système de suivi via une plateforme numérique consultable par le médecin traitant. Via cette dernière, tous les services d’urgences hospitaliers pourraient transmettre les informations médicales concernant le TCL du patient au médecin traitant », explique le Dr Gil-Jardiné.
Exergue : « Nous réfléchissons à un système de suivi via une plateforme numérique consultable par le médecin traitant »
Entretien avec le Dr Cédric Gil-Jardiné (CHU de Bordeaux)
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