L’imagerie dans les urgences cardiologiques

Vers l’échographie dans les syndromes coronaires aigus

Publié le 13/02/2012
Article réservé aux abonnés

LES DONNÉES RECUEILLIES entre 2000 et 2007 dans les trois registres des cardiopathies ischémiques français, chez les sujets âgés de 35 à 74 ans, mettent en évidence une diminution de la morbidité et de la mortalité coronaires (1). En particulier, depuis plusieurs décennies, une baisse de la létalité à 28 jours des malades hospitalisés est régulièrement observée, grâce à une amélioration spectaculaire de la prise en charge des épisodes d’insuffisance coronaire aiguë (2). Elle tend toutefois à se stabiliser.

Incertitudes diagnostiques au tri.

Les difficultés de prise en charge des cas les plus graves sont l’un des facteurs responsables de cette limite dans la prise en charge de l’infarctus du myocarde. Une autre difficulté réside dans le temps d’attente dans les services d’accueil des urgences, liés aux incertitudes diagnostiques. Dans ces services, en effet, le tri et l’orientation des patients ayant une douleur thoracique est souvent difficile.

Si le diagnostic d’une douleur thoracique typique de syndrome coronarien est le plus souvent aisé (douleur constrictive rétrosternale associée à des modifications électrocardiographiques et à une élévation des enzymes myocardiques), ce n’est pas le cas des douleurs atypiques. Les diagnostics différentiels à évoquer sont alors des lésions cardiaques, vasculaires, pulmonaires, pleuro-pariétales mais également abdominales, digestives et musculo-squelettiques.

Au total, s’il y a peu de patients se présentent aux urgences avec un infarctus du myocarde aigu ou un angor instable et qui ne sont pas hospitalisés, le rejet de ces patients est associé à une mortalité accrue. Le nombre d’erreurs diagnostiques par défaut a été évalué à 2 % (3).

Agents de contraste.

La pratique de la coronarographie a très largement participé à l’amélioration du devenir des patients. De nouvelles méthodes, non invasives, ont été développées pour évaluer l’anatomie des coronaires, en particulier la scanographie multicoupe… Une autre approche consiste à utiliser l’échocardiographie, en faisant appel à des produits de contraste utilisant des microbulles composées de gaz inertes de haut poids moléculaire. Ces microbulles ont une rhéologie proche de celle de globules rouges, une haute rémanence vasculaire et une faible diffusion dans l’espace extravasculaire. Cela permet ainsi l’étude de la perfusion myocardique, notamment dans le cadre de l’urgence (4). Cette pratique, répandue outre-Atlantique, n’est pas pratiquée en France, les agents de contraste en échographie n’ont pas d’autorisation de mise sur le marché dans cette indication.

Examen suspicieux.

L’examen échocardiographique chez un patient est particulièrement utile lorsque les résultats de l’exploration clinicobiologique se situent dans « la zone grise », qui matérialise l’incertitude. Dans tous les cas, l’examinateur doit être attentif, exhaustif, suspicieux, et les résultats de l’examen doivent être confrontés aux données de la clinique.

Les recommandations de la Société européenne de cardiologie laissent toute leur place à ces explorations échographiques. Elles précisent qu’un échocardiogramme est recommandé chez tous les patients pour évaluer leur fonction ventriculaire gauche segmentaire et pour porter ou éliminer les diagnostics différentiels (classe IC). Parallèlement, l’American College of Cardiology recommandent un diagnostic stratifié, fondé avant tout sur la clinique, puis sur les examens complémentaires et enfin sur l’imagerie.

Parmi les techniques d’avenir, il faut citer aussi « speckle tracking », ou suivi dans l’espace de marqueurs acoustiques naturels et la mesure du strain longitudinal, qui permet d’explorer la déformation du myocarde ventriculaire.

D’après la communication d’A. Maudière (Tours).

(1) Wagner A, et coll. Bull Épidémiol Hebdo 2011;(40-41):415-19.

(2) Ducimetière P, et coll. Bull Épidémiol Hebdo 2011;(40-41):419-22.

(3) Pope JH, et coll. N Engl J Med. 2000;342(16):1163-70.

(4) Labovitz AJ, et coll. J Am Soc Echocardiogr 2010;23(12):1225-30.

(5) Napan S,et coll. Congrès de l’American Society of Echocardiography, sessions scientifiques 2011, Abstract P2-09.

(6) Jamal F, et coll. J Am Soc Echocardiogr 2002;15(7):723-30.

 Dr GÉRARD BOZET

Source : Le Quotidien du Médecin: 9082