Le patron de la CNAM appose sa griffe sur les négos

Un an et demi après sa nomination à la tête de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), Nicolas Revel mène ses premières « négos » avec les médecins libéraux. 

Cet exercice hautement périlleux intervient après une période de forte mobilisation de la profession contre la loi de santé de Marisol Touraine. « Nicolas Revel essaie de renouer avec les médecins et la convention peut être l'occasion de leur envoyer des signaux », analyse le Dr Claude Pigement, ancien responsable santé au PS.

Le directeur actuel de la CNAM est jugé beaucoup plus proche du gouvernement en place que son prédécesseur, Frédéric van Roekeghem, qui avait été nommé par la droite. Cela signifie-t-il qu'il n'a pas d'autonomie ? « Nicolas Revel est diplomate, calme et posé, nous verrons comment il tiendra sa ligne politique », observe le député (Les Républicains) du Loiret, Jean-Pierre Door, qui l'a auditionné à deux reprises.

Marathon 

Lors des trois premières séances, l'ancien secrétaire général adjoint de l'Élysée a commencé à imposer sa marque. Celle d'un négociateur rigoureux mais ouvert. « Il met tout le monde sur un pied d’égalité, quelle que soit la représentativité des syndicats », confie le Dr Philippe Cuq, coprésident du BLOC. Le patron de la CNAM se montre le plus possible à l'écoute. « Revel note tout ce qu'on lui dit, il note, il note, tout en disant qu'il n'a guère de marge de négociation », s'impatiente le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF.

Nicolas Revel a prévu de prendre son temps. Une vingtaine de séances de négociations sont prévues pour tenter d'aboutir à un accord d'ici à la mi-juillet. D'aucuns y voient une « stratégie d’épuisement » même si le directeur n'a pas programmé (pour l'instant) les séances nocturnes qu'affectionnait particulièrement son prédécesseur.  

À la tête de la CNAM, Nicolas Revel semble vouloir se démarquer de Frédéric van Roekeghem, qui a occupé ce poste pendant dix ans. Mais il n'échappe pas à la comparaison. « Rocky était un personnage affable mais retors, confie un syndicaliste. Je trouve pour l'instant Nicolas Revel plus direct, plus droit et plus franc. »

Depuis sa prise de fonction en novembre 2014, le DG de l'assurance-maladie a soigneusement évité toute provocation. Il privilégie les mesures incitatives à l'installation pour assurer une meilleure répartition des médecins. Côté dépassements d'honoraires, il entend pérenniser l'avenant 8 et le contrat d'accès aux soins dont il juge le bilan « positif ». Et dès le début des négos, il a sanctuarisé la prise en charge aux deux tiers de l'ASV en secteur I, un prérequis pour les syndicats.  

Mais Nicolas Revel sait parfois dire non. Il a rejeté d'emblée l'ouverture d'un espace de liberté tarifaire à l'ensemble des médecins et exprimé ses doutes sur la possibilité de créer un forfait secrétariat jugé trop coûteux.

Sur un chemin étroit, le patron de la CNAM se montre « d'une prudence de Sioux », estime le Dr Claude Leicher, président de MG France. Mais il se garde de promesses onéreuses qu'il ne pourrait tenir. « On ne pourra pas à la fois augmenter la valeur du C et majorer le tarif pour des consultations longues et complexes sur une part d'activité significative (au-delà de 10 à 15 %), a prévenu Nicolas Revel.

Pas de tweets pendant les séances

Le DG sait aussi se montrer directif. Il a donné pour consigne aux syndicalistes de ne pas s'exprimer sur Twitter pendant les séances. Et il a rappelé à l'ordre la FMF qui avait adressé à ses adhérents un communiqué circonstancié de la première réunion…

Quelle que soit la méthode, Nicolas Revel sera jugé en juillet sur ses résultats. Il a indiqué vouloir conclure une convention avec le plus grand nombre de syndicats médicaux. « Il va mouiller la chemise, fera tout pour aboutir et pour en sortir grandi, assure le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. Mais en aura-t-il les moyens ? »