Pratiquement 3/4 des personnes de plus de 75 ans ont une pathologie cardiovasculaire, avec une mortalité multipliée par 2 à 6 par rapport aux plus jeunes.
Chez ces sujets, les difficultés commencent parfois à l’étape diagnostique. L’ECG d’effort n’est pas toujours réalisable, et les épreuves de stress pharmacologiques pas toujours bien tolérées. Quant aux examens avec produits de contraste, leur morbimortalité est majorée chez les octogénaires, surtout en cas d’atteinte rénale. Quoi qu’il en soit, « avant toute décision, la première étape est celle d’une évaluation gériatrique, en particulier des troubles cognitifs, de l’état nutritionnel, des comorbidités, des effets secondaires des traitements, de l’environnement socio-familial qui sera déterminante pour fixer les objectifs de prise en charge », souligne le Dr Fabienne Bellarbre (CHU de Poitiers).
L’insuffisance cardiaque, maladie du sujet âgé
L’âge moyen de l’insuffisance cardiaque est de 75 ans. Elle est souvent liée à une FA, une HTA, une cardiopathie ischémique et est très fréquemment associée à l’insuffisance rénale, la BPCO, le diabète, l’anémie. Les comorbidités, respiratoires en particulier, peuvent faire errer le diagnostic. Comme pour toute pathologie chez le sujet âgé, le traitement est débuté à des posologies faibles avec augmentation progressive des doses, si nécessaire sous surveillance hospitalière. Le pronostic est sombre, avec en particulier 40 à 50 % de réhospitalisations à 6 mois.
Néanmoins l’étude SENIORS avait montré qu’on pouvait significativement réduire le nombre de décès ou d'hospitalisations pour cause cardiovasculaire. Il faut noter que la proportion d’insuffisances cardiaques, à fonction systolique préservée, augmente avec l’âge (en proportion égale avec l’insuffisance cardiaque systolique au-delà de 75 ans), en particulier chez les femmes, et qu’il n’existe pas de thérapeutiques éprouvées pour cette pathologie en dehors de la prise en charge des causes de l’insuffisance cardiaque et des comorbidités.
FA et coronaropathie, le problème des anticoagulants
Dans la FA, pour prévenir le risque d’AVC ischémique, les dernières recommandations préconisent l’anticoagulation dès que le score CHADS2VASC est ›1, or un âge supérieur à 75 ans compte pour 2 points ! Un traitement anticoagulant devrait donc être institué chez tous les patients de plus de 75 ans, en tenant compte du risque hémorragique qui augmente aussi avec l’âge. Sachant que les anticoagulants oraux directs (AODs) constituent une bonne alternative aux AVK dans la FA non valvulaire lorsque la fonction rénale le permet, avec un moindre risque d’AVC hémorragique. « S’il n’existe pas d’études spécifiques aux patients très âgés, les octogénaires étaient cependant bien représentés dans les essais cliniques sur les AODs », explique Fabienne Bellarbre.
La pathologie coronaire est très fréquente chez le sujet âgé, souvent associée à une dysfonction ventriculaire volontiers diastolique et à d’autres localisations de l’athérosclérose. La symptomatologie douloureuse est généralement moins typique et l’ischémie silencieuse n’est pas rare. Le pronostic, en l’absence de traitement, est péjoratif, pouvant justifier des thérapeutiques interventionnelles, même si la iatrogénie est plus élevée.
On pratique des angioplasties de plus en plus tard, mais le taux de complications est multiplié par plus de trois chez un octogénaire par rapport à la tranche d’âge 50/60 ans. L’indication de la bithérapie antiagrégante doit être bien pesée. L’association AAP/AVK doit être évitée vu le risque majeur d’hémorragie, aussi la pose de stents actifs est-elle déconseillée chez un patient âgé sous AVK au long cours.
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