Hypertrophie bénigne de la prostate

Une pathologie bénigne, mais pas toujours anodine

Publié le 21/11/2014
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L’hypertrophie bénigne de la prostate est extrêmement fréquente, puisque 90 % des hommes de plus de 80 ans présentent des lésions histologiques bénignes de cette affection. Le bilan initial vise à repérer les formes compliquées qui devront faire demander un avis urologique avant instauration d’un traitement.

Crédit photo : ZEPHYR/SPL/PHANIE

Le principal facteur de l’HBP est l’avancée en âge. L’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP), très fréquente chez les hommes âgés est une source fréquente de symptômes urinaires, d’inconfort, de troubles du sommeil et d’altération de la qualité de la vie. Elle est le plus souvent révélée par des troubles mictionnels, mais elle doit être évoquée devant des mictions par regorgement voire des formes évoluées comme une insuffisance rénale. La démarche vise à répondre à plusieurs questions : les troubles mictionnels sont-ils liés à une HBP, quelle est leur sévérité, existe-t-il déjà des complications ?

Quantifier la gêne urinaire

Le toucher rectal permet de rapporter les troubles mictionnels à une hypertrophie prostatique et d’éliminer une induration de la prostate pouvant évoquer un cancer associé. L’échographie rénale, vésicale et prostatique précise, quant à elle, le volume de la prostate, sa forme et en particulier le développement d’un lobe médian, facteur aggravant les troubles urinaires et répondant moins bien au traitement médical. Elle indique en outre l’état de la vessie (vessie de lutte avec diverticules, calculs), la présence d’un résidu post-mictionnel, des anomalies du parenchyme rénal et un éventuel retentissement sur le haut appareil avec dilatation des cavités pyelocalicielles. Le dosage des PSA n’a pas d’indication dans cette situation d’autant qu’il est souvent faussement élevé dans l’HBP. On demandera un ECBU et un dosage de la créatinine si on craint un retentissement sur le haut appareil urinaire.

Le score IPSS (International Prostate Symptom Score), noté sur 35, est utile pour quantifier la gêne urinaire. « Les troubles sont sévères lorsqu’il est supérieur à 20 ; dans ce cas, de même que si le résidu post-mictionnel est ›100 ml, qu’il existe des calculs vésicaux, un retentissement sur le haut appareil ou des infections fréquentes, il est souhaitable d’adresser le patient à un urologue?», avertit?le?Pr Cussenot (service d’urologie, hôpital Tenon). D’autres examens plus spécialisés (débitmétrie ou fibroscopie vésicale) pourront être pratiqués si on s’oriente vers un traitement endoscopique ou chirurgical.

Un large choix thérapeutique

En l’absence de ces facteurs de gravité, on peut envisager d’emblée un traitement médical. Les extraits de plantes ont des effets modestes mais prouvés en cas de troubles fonctionnels modérés et sont bien tolérés. Les αalphabloquants ont un effet relaxant sur les fibres musculaires lisses de l’appareil urinaires et améliorent le débit mictionnel. Les inhibiteurs de la 5-réductase, le finastéride qui inhibe l’isozyme de type 2 et le dutastéride, les isozymes 1 et 2 sont les seuls à avoir une action autre que symptomatologique puisqu’ils diminuent le volume de la prostate de 20 à 30 % après 3 à 6 mois de traitement. Les IPDE5 agissent sur la musculature lisse et l’un d’eux (le tadalafil) a maintenant l’AMM dans l’HBP à dose quotidienne modérée (5 mg/jour) mais n’est pas remboursé.

Les AINS peuvent être prescrits dans les poussées d’HBP, souvent?inflammatoires,?à doses usuelles jusqu’à 4 à 6 semaines sous réserve d’une surveillance de la fonction rénale et de l’absence de contre-indications digestives entre autres.

L’association αalphabloquants-inhibiteurs de la 5-réductase est synergique, la combinaison inhibiteurs de la 5-réductase et IPDE5 compensant l’impact des premiers sur la dysfonction érectile. « La prescription des anticholinergiques relève de l’avis urologique, vu le risque de rétention aiguë ; ils peuvent être envisagés chez des patients peu dysuriques et très pollakiuriques pour réduire la pollakiurie », explique le Pr Cussenot.

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : lequotidiendumedecin.fr